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malgré ces embarras, Florence ne pouvait se résoudre à s’effacer devant Pise, à lui céder la gloire d’appeler et de retenir dans ses murs, autour de maîtres célèbres, la jeunesse italienne ; ne fût-ce que par jalousie, elle recommençait toujours, entre deux crises, à s’occuper de son université, elle tentait de détourner à son profit le courant qui portait les étudians vers les écoles de Pise, plus anciennes que celles de Florence. Après la dernière révolte de Pise contre la suprématie florentine en 1497, l’école de Pise fut même fermée par les vainqueurs et le resta pendant plus de cinquante ans ; les cours en avaient d’abord été transférés à Prato, puis ils s’étaient fondus avec ceux de Florence.

Les choses allèrent ainsi jusqu’au moment où Pise et Florence se virent réunies, dans une même servitude, sous le sceptre des Médicis, devenus souverains héréditaires de toute la Toscane. L’intérêt du prince était de ne pas laisser Pise mourir tout à fait ; peut-être aussi trouvait-il avantage à éloigner de sa capitale un élément toujours remuant, la jeunesse universitaire. On n’était pas encore assez loin des dernières convulsions de la liberté florentine pour que l’esprit républicain d’autrefois ne pût se réveiller par accès à Florence. A Pise, les étudians seraient plus faciles à surveiller ; dans ces rues vides et mornes, leurs cris, s’ils en poussaient, resteraient sans écho.

Cosme, premier grand-duc, rétablit donc en 1543 l’université de Pise dans tous ses honneurs et privilèges séculaires ; Florence ne garda que quelques cours de théologie, de lettres italiennes, latines et grecques. Dans la seconde moitié du dernier siècle, la dynastie de Lorraine ajouta plusieurs chaires. Ainsi Léopold fonda à Florence un enseignement élémentaire du droit pour les aspirans aux emplois inférieurs de la magistrature et de l’administration. Il y eut aussi des cours de philosophie morale, d’histoire sacrée et profane, de botanique, de mathématiques ; d’autres s’ouvrirent à l’académie des beaux-arts. Tous ces cours ne formaient point un système complet et régulier d’études universitaires, couronnées par la collation de grades ; cependant, malgré cette absence de sanction, malgré les lacunes et les variations de ses cadres, cet enseignement dut contribuer à entretenir chez les Florentins le goût des choses de l’esprit, à leur conserver le droit de passer, jusqu’à ces derniers temps, pour les plus intelligens et les plus cultivés de tous les Italiens.

Ces cours étaient destinés à tous ceux qui voulaient compléter leur instruction générale ; sur la proposition du savant bibliothécaire de la Laurentienne, Bandini, Léopold en fonda d’autres d’un caractère tout scientifique et tout spécial. La bibliothèque Laurentienne était une des plus riches de l’Europe en manuscrits