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institut de hautes études pratiques et de perfectionnement (Istituto supertore di studîi pratici e di perfezionamento). À l’appui de cette décision, le ministre pouvait invoquer des souvenirs qui, pour remonter à une époque déjà lointaine, n’en étaient pas moins restée présens à la mémoire des patriotes florentins. L’établissement à Florence d’un centre d’enseignement supérieur n’était point une nouveauté sans précédens ; c’était au contraire la réalisation d’une pensée qu’avait conçue la république florentine dans le cours de ce grand siècle où son génie avait enfanté presqu’à la fois la Divine Comédie de l’Alighieri, le dôme d’Arnolfo di Cambio, les peintures de Giotto. On a conservé le texte des considérans par lesquels la seigneurie justifiait en 1321 le projet de cette création : on y sent le même amour du grand, on y reconnaît la même largeur de vues, on y entend retentir le même accent libre et fier que dans le fameux décret de 1296 par lequel la république avait décidé la reconstruction de la cathédrale et avait ordonné à l’architecte « d’y déployer la plus haute et la plus somptueuse magnificence qui se pût inventer, de manière que toute l’industrie et toute la puissance des hommes ne pussent faire église ni plus belle ni plus grande. »

La nouvelle université (studium florentinum) s’organisa donc, vers le milieu du XIVe siècle, sur le modèle de l’université de Bologne, la plus ancienne de l’Italie. Toute la science du temps y fut représentée par des maîtres dont plusieurs ont laissé un nom célèbre. Ce fut là que, pour la première fois en Occident depuis la chute de l’empire romain, le grec fut enseigné dans une chaire publique ; en 1350, Léonce Pilate, engagé tout exprès sur la recommandation de Boccace, vint expliquer à Florence le texte d’Homère pendant que Boccace lui-même y commentait la Divine Comédie. De 1429 à 1435, Philelphe avait là jusqu’à 400 auditeurs ; dans la semaine, il leur expliquait les auteurs grecs et latins, et tel était le zèle des élèves et du maître, que celui-ci donnait parfois jusqu’à trois leçons par jour ; le dimanche, il interprétait le poème de Dante dans l’église même de Sainte-Marie-des-Fleurs. Un peu plus tard, Marsile Ficin enseignait la philosophie platonicienne avec un aussi brillant succès.

En 1451, l’université florentine comptait 42 professeurs, mais vers la fin du XVe siècle et dans toute la première moitié du siècle suivant la vie de la république fut si agitée et si précaire, si troublée par les vicissitudes de la politique italienne et par les luttes des partis que bien souvent la seigneurie ne sut pas trouver dans sa caisse les 2,500 florins d’or qu’exigeaient les dépenses courantes de l’université. Il arrivait alors que les professeurs n’étaient pas remplacés ; certaines chaires restaient vacantes, ce qui suspendait ou tout au moins ralentissait la vie universitaire. Cependant,