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n’importe, vous paierez toujours la même taxe. De même pour l’impôt mobilier, qui repose aussi sur le loyer et qui est censé atteindre le revenu. Ce revenu aura beau diminuer et vos charges s’accroître, la taxe n’en sera pas moins due pour la somme qui a été fixée, et, si vous voulez la faire réduire, il vous faudra diminuer l’importance de votre habitation. De même encore pour la taxe des portes et fenêtres, qui reste stable, malgré la diminution de valeur qui, pour une cause ou pour une autre, vient atteindre la maison sur laquelle elle pèse. L’impôt foncier enfin, établi d’après un certain revenu supposé, ne changera pas, quelles que soient les modifications qu’éprouve ce revenu. C’est l’avantage et le désavantage de ces taxes pour ceux qui ont à les payer, avantage quand les bénéfices ou les revenus augmentent, désavantage lorsqu’ils diminuent. Mais, dans un cas comme dans l’autre, une fois réparties, elles doivent être payées ; elles forment la partie assurée du budget, celle qui reste indépendante de toute influence politique et économique. Il en est autrement avec les impôts attachés à l’accomplissement de certains actes. Si j’ai intérêt à demander l’inscription au bureau des hypothèques d’une obligation consentie à mon profit, ou à faire enregistrer l’acte d’acquisition, d’une propriété, intérêt encore à faire un voyage en chemin de fer, ou à envoyer des marchandises par grande ou petite vitesse, j’accomplis ces actes et je paie l’impôt qui y est attaché. Mais, si les circonstances financières ou politiques sont telles que je n’aie pas d’argent à prêter, point d’acquisition à faire, point de voyage à effectuer et point de marchandises à expédier, je m’abstiens, et je ne subis point de taxes. Il y a bien quelques cas, il est vrai, où la taxe est encourue malgré la volonté de celui qui est appelé à la payer, et souvent en raison même de la misère où il se trouve lorsqu’on est soumis, par exemple, à des poursuites judiciaires et qu’on est obligé de supporter des droits de timbre et d’enregistrement ; mais ces cas, qui donnent lieu à beaucoup de critiques, et qu’on veut réformer dans une certaine mesure, ne constituent pas, à vrai dire, la règle. La règle est qu’on ne paie la taxe sur les actes que lorsqu’on a intérêt à le faire et qu’il peut en résulter pour vous un avantage.

Maintenant s’ensuit-il que ces taxes sont bonnes, et qu’il n’y a rien à dire contre elles ? Tant s’en faut. Dans notre précédent travail sur les impôts de consommation, nous avons montré que le principal mérite de ces impôts était de se payer petit à petit par fractions minimes et de produire beaucoup, en gênant fort peu le contribuable. Les taxes sur les actes ou sur les affaires, comme on voudra les appeler, car on peut leur donner l’un ou l’autre nom, sont loin d’avoir ce mérite ; elles sont au contraire assez