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L’ENFANCE À PARIS.

familiarisant davantage avec ses aspects. Au lieu de terminer complètement leur enseignement professionnel dans l’orphelinat, il vaudrait peut-être mieux les placer en apprentissage dans des ateliers bien tenus qu’elles quitteraient chaque soir pour venir coucher à l’orphelinat. Quelques institutions sont entrées dans ce système, qu’il y aurait avantage à généraliser. Peut-être pourrait-on aussi, principalement dans les temps qui précéderont leur sortie de la maison, s’appliquer à renouer et à faciliter les relations de ces jeunes filles avec les membres de leurs familles qui y seraient disposés et qui pourraient devenir pour elles des appuis. Malheureusement les sœurs nourrissent contre les familles une méfiance qui est trop souvent bien fondée, et le règlement de la plupart de leurs maisons s’attache à rendre aussi rares que possible les visites des parens (dont beaucoup ne se soucient guère aussi de profiter de cette facilité) et prohibent absolument les sorties. Je dois dire cependant que la direction intelligente de quelques-uns de ces établissemens comprend parfaitement la nécessité de préparer le retour des enfans dans le monde et dans la famille. C’est ainsi que la maison de la rue de Picpus dont j’ai parlé ouvre largement tous les dimanches ses parloirs et ses cours aux familles des enfans, et accorde à ces dernières une sortie par mois, sans préjudice des vacances.

Enfin je crois qu’il y aurait tout avantage à varier un peu les métiers auxquels on prépare ces jeunes filles, et à ne pas les employer presque uniquement à des travaux de couture, lingerie et broderie où elles acquièrent une habileté extraordinaire, mais où elles rencontrent aussi une redoutable concurrence. Il existait autrefois à Strasbourg une œuvre dite des servantes catholiques qui préparait les jeunes filles au service domestique. J’ai toujours été étonné qu’on n’eût point pensé à relever à Paris cette œuvre excellente, qui rendrait de grands services à la fois aux jeunes filles et aux familles, et je regrette en même temps que dans un certain nombre d’orphelinats on néglige, à raison de certaines difficultés pratiques, de donner aux jeunes filles ce minimum de notions culinaires et ménagères qui sont indispensables dans la vie populaire. Ces critiques faites, car même en présence des institutions les plus respectables la vérité ne doit jamais perdre ses droits, constatons que ces établissemens, comme tous ceux qui sont tenus par des congrégations religieuses, sont pour la population nécessiteuse d’un très grand secours et contribuent à entretenir parmi les jeunes filles ces habitudes de propreté, de décence extérieure et de raffinement qui dans les basses classes rendent la population féminine de Paris tellement supérieure à celle de Londres.

Écoles primaires, écoles professionnelles, ouvroirs, orphelinats, ne