Page:Revue des Deux Mondes - 1878 - tome 27.djvu/918

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
912
REVUE DES DEUX MONDES.

que de signaler, en les désignant par leur nom, tous les établissemens qui concourent à ce résultat. Je me bornerai à les distinguer par catégories, en indiquant à quelle nature de besoins ces établissemens répondent.

Au premier rang des institutions qui préservent les enfans de contracter des habitudes de mendicité et de vagabondage, il faut placer les asiles et les écoles primaires. J’ai déjà eu occasion, au début de ces études, de dire et de démontrer qu’il ne fallait pas prétendre à établir une corrélation trop directe entre l’instruction et la moralité, et qu’on s’exposerait à recevoir des faits de singuliers démentis, si l’on voulait affirmer que les départemens les plus instruits sont aussi ceux où se commettent le moins de crimes et de délits. Trop de causes diverses interviennent dans les mobiles déterminans de la criminalité pour qu’il soit possible de ramener toutes ces causes à une seule : l’ignorance. Mais, sans compter que l’instruction est un des moyens les plus efficaces de combattre la misère, qui est et restera toujours le grand mobile de la criminalité, on ne saurait nier qu’en ce qui concerne les enfans des grandes villes, tous ceux qui ne fréquentent habituellement aucune école ne soient, à d’assez rares exceptions près, sur la pente du vagabondage, et que l’école ne soit d’autant plus volontiers et plus régulièrement fréquentée par eux qu’elle se trouve davantage à leur portée. À ce point de vue, il faut signaler les immenses progrès réalisés à Paris depuis dix ans. En 1867, le nombre des asiles était de 83, comprenant 12,379 places, et celui de écoles de 220, comprenant 52,641 places. Aujourd’hui, le nombre des asiles s’élève à 119, comprenant 18,876 places, et celui des écoles à 303, comprenant 101,197 places. Toutes ces nouvelles écoles sont spacieuses, propres, abondamment pourvues de tout ce qui peut rendre pour des enfans l’enseignement primaire à la fois amusant et profitable, et la façon intelligente dont elles sont aménagées fait beaucoup d’honneur à la direction de l’enseignement primaire ainsi qu’à la préfecture de la Seine. Mais au conseil municipal de Paris revient le mérite d’avoir sans marchander répondu à l’appel de l’administration et mis des crédits considérables à sa disposition. Si nos conseillers n’avaient le tort de poursuivre parallèlement une absurde campagne contre l’enseignement congréganiste, il faudrait savoir reconnaître qu’ils ont bien mérité sous ce rapport de la population parisienne et de tous les amis de l’enfance.

La période de dix à douze ans, durée ordinaire des études primaires, n’est pas la plus dangereuse et la plus difficile à passer pour les enfans du peuple. Celle de l’apprentissage, qui commence à la sortie de l’école primaire, est bien plus redoutable, car, de douze à seize ou dix-sept ans, ils sont exposés, garçons et filles, à