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ministère dont elle fait naturellement partie ; il s’agit maintenant de l’organiser de façon à lui permettre de rendre les services qu’on est en droit d’en attendre. Parmi les réformes qu’elle comporte, les unes sont générales, c’est-à-dire communes à tous les autres services publics, les autres sont spéciales, c’est-à-dire inhérentes à la nature même des fonctions qu’elle a à remplir.


I

L’administration, prise dans son ensemble, a pour objet de donner satisfaction aux besoins sociaux ; elle est locale ou publique. L’administration locale n’a en vue que les besoins nés de l’agglomération d’un certain nombre d’individus sur un même point ; elle comprend les intérêts communaux ou départementaux ; elle est attribuée, sous la surveillance des préfets, soit aux maires assistés des conseils municipaux, soit aux conseils généraux. L’administration publique au contraire embrasse les intérêts généraux du pays et la sauvegarde des droits primordiaux de l’individu ; elle est exercée par des fonctionnaires organisés en services spéciaux, répartis eux-mêmes entre divers ministères. C’est de cette dernière seulement que nous avons à nous occuper ici.

De tous les pays de l’Europe, c’est incontestablement la France qui possède l’administration la plus honnête et la plus scrupuleuse. A aucun degré de l’échelle, on ne rencontre d’agens trafiquant de leurs fonctions et disposés à se faire acheter leurs complaisances. Depuis les ministres et les directeurs généraux jusqu’aux simples préposés des forêts, des douanes ou des postes, les fonctionnaires sont en très grande majorité animés, avec plus ou moins de zèle et d’intelligence, de l’amour du bien public et soucieux de leurs devoirs. Ils sont souvent chargés de faire observer des règlemens vexatoires ; mais ils ne cherchent pas à s’y soustraire et ne se font pas payer pour les enfreindre.

Cette moralité administrative tient à plusieurs causes, d’abord à ce que les administrations publiques se recrutent en général dans les classes éclairées, qui, quoiqu’on en dise, sont encore les plus honnêtes ; ensuite parce qu’on exige de ceux qui veulent y entrer certaines garanties de capacité et d’honorabilité qui excluent les premiers venus. Pour les unes, il faut sortir des écoles spéciales après avoir passé par des épreuves difficiles et fait des frais d’études considérables ; pour les autres, il faut subir des examens préalables et faire un stage de plusieurs années. Les emplois subalternes sont généralement confiés à d’anciens sous-officiers bien notés qui trouvent, en entrant dans une administration, des