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haranguer et les inviter à se disperser. L’ancien maire de Ners s’était joint à lui. Ils tuèrent ce dernier ainsi qu’un cavalier et blessèrent assez grièvement l’officier. L’escadron, composé de jeunes soldats, n’osa tenter de passer. Les uns se réfugièrent à Uzès, les autres revinrent à Nîmes, où l’on craignit une marche en avant des bandes, exaltées par ce facile succès, et poussées par quelques chefs inconnus. Le préfet publia alors un arrêté dans lequel signalant, comme la cause de ces désordres, la présence dans la Gardonnenque d’un grand nombre de déserteurs et de fédérés de Nîmes, de Montpellier, d’Avignon, d’Arles et de Tarascon, il prescrivait l’envoi sur les lieux d’une force royale, appuyée par les Autrichiens, chargée de chasser des communes les étrangers et de réorganiser partout les gardes nationales. En exécution de cet arrêté, 800 Tyroliens, sous les ordres du général de Stahremberg, sortirent de Nîmes, avec les chasseurs d’Angoulême. Au-delà de Ners, ils trouvèrent les rebelles rangés en bataille, qui tirèrent sur eux en les voyant, leur tuèrent quatre soldats et en blessèrent neuf. Une charge générale dispersa ces guerriers improvisés. Ils laissèrent soixante des leurs sur le sol et trois prisonniers aux mains des Autrichiens. Ramenés à Nîmes, le 25 août au matin, jugés en quelques instans par une cour martiale, ces trois individus furent fusillés sur l’ordre du général de Stahremberg, qui prévint le marquis d’Arbaud de Jouques qu’il les avait traités conformément au code militaire autrichien, non comme des prisonniers de guerre, mais comme des révoltés. Pendant ce temps, la colonne autrichienne parcourait la Gardonnenque et la Vaunage, en chassait les meneurs, et désarmait les bandes. Quatorze individus furent encore fusillés pour avoir voulu leur résister[1]. Les Autrichiens, qui, sous prétexte d’aider à rétablir le calme dans les contrées du Midi, ne cherchaient qu’à s’avancer jusque vers les Pyrénées, occupaient à la fin du mois d’août tout le département du Gard, menaçant l’Hérault et la Lozère. Pour arrêter leur marche, il fallut l’intervention ferme et directe du duc d’Angoulême, qui obtint d’abord qu’ils n’iraient pas plus loin, et ensuite qu’ils évacueraient le département.

Cette même journée du 25 août fut signalée à Uzès par un nouveau crime de Jean Graffand. Durant la soirée de la veille, Trestaillons était arrivé dans cette ville, et, son arrivée coïncidant avec la marche des. Autrichiens sur Ners, les autorités craignirent avec raison qu’elle servît de prétexte à quelque conflagration, surtout si, à la faveur de l’agitation générale, Jacques Dupont et Jean Graffand parvenaient à s’entendre pour frapper encore des innocens. N’osant

  1. Rapports du préfet. Archives nationales.