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inauguré une méthode nouvelle dans l’étude des cimetières chrétiens, ou plutôt d’être revenu à la méthode de son illustre prédécesseur, Bosio. On l’avait abandonnée depuis deux siècles, au grand détriment de la science. La manière dont on explorait les catacombes était assez semblable à celle qu’on suivait pour tous les autres monumens antiques, et qui leur avait été si funeste. On y descendait de temps en temps pour y copier en toute hâte quelque inscription ou quelque fresque. On enlevait tout ce qui pouvait se prendre, et on le plaçait dans quelque musée : là l’œuvre d’art, isolée de ce qui l’entourait, détachée de ces murs pour lesquels on l’avait faite, perdait son caractère et son importance. Ces curiosités de détail, qui ne doivent être qu’accessoires, faisaient oublier l’étude des catacombes elles-mêmes, qui sont l’œuvre la plus étonnante des premiers siècles du christianisme. M. de Rossi au contraire entreprit d’en faire une exploration régulière et méthodique. Il reconnut l’emplacement des divers cimetières, leur rendit leur nom véritable, et recueillit tout ce que les documens antiques racontent de chacun d’eux. Il en refit patiemment toute l’histoire ; il essaya de retrouver autant que possible l’époque où chaque galerie avait été creusée, ce qui du même coup donnait l’âge des monumens qu’on y trouvait. Comme il apportait à ces recherches une sagacité merveilleuse avec une immense érudition, il y a presque toujours réussi. Non-seulement il doit à cette méthode rigoureuse d’avoir fait lui-même de belles découvertes, mais, comme dans l’avenir on ne cessera pas de la suivre, il aura une part aussi dans les découvertes qu’on fera plus tard.

Les premiers travaux de M. de Rossi ont consisté à confirmer quelques opinions de ses prédécesseurs qu’on avait contestées : il fallait, avant d’aller plus loin que les autres, ne laisser aucun doute derrière soi. Les catacombes sont des cimetières qui n’ont servi qu’aux chrétiens ; on n’en peut plus douter aujourd’hui : les fouilles qu’on y poursuit sans relâche depuis un demi-siècle n’y ont pas fait découvrir une seule tombe païenne. Mais est-il vrai de prétendre que ce soient les chrétiens qui les ont toutes creusées ? On en avait douté à cause de l’immensité même de l’entreprise, et l’on supposait souvent qu’ils avaient profité de travaux antérieurs. C’est une question que M. de Rossi a définitivement résolue. Il a distingué plus nettement qu’on ne l’avait fait les anciennes carrières de sable dont les chrétiens se sont quelquefois servis, des galeries qu’ils ont creusées eux-mêmes, et il a montré que ces carrières étaient en somme fort rares aux catacombes. On ne pouvait s’en servir qu’en construisant de fortes murailles pour les étayer ; ce travail était si pénible et si peu sûr que les chrétiens préféraient attaquer hardiment le tuf et percer des galeries nouvelles. On peut donc dire qu’à l’exception de quelques carrières anciennes qui se reconnaissent sans