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un pays où il n’était plus le maître. En effet, Pie IX s’est enfermé lui-même dans le Vatican et s’est fait une loi de n’en plus sortir ; mais on peut dire que, dans cette prison volontaire, il a paru plus libre que jamais, et, tandis que ses partisans le plaignaient de son esclavage, il a semblé vouloir, par son indomptable fermeté, par sa fière attitude et la hardiesse de sa parole, leur donner lui-même un démenti. On disait qu’ayant perdu les revenus de son état il ne posséderait plus rien, et l’on gémissait d’avance sur sa misère. C’est le contraire qui est arrivé. La chrétienté est venue à son secours, et les offrandes ont été si abondantes que non-seulement elles ont subvenu aux nécessités présentes, mais qu’on a pu, dit-on, par des placemens habiles, assurer aussi l’avenir. Pie IX a pu suffire à tout ce qu’il avait conservé de ses anciennes dépenses. Il a continué jusqu’à la fin à payer libéralement tous les employés civils et militaires qui ont voulu rester à son service, et l’on plaisante beaucoup à Rome sur le dépit des fonctionnaires italiens qui ne se trouvent pas plus riches pour travailler que ne le sont ceux du pape pour ne rien faire. C’est ainsi que le trésor pontifical a pu continuer à fournir les subventions qu’il donnait autrefois pour les fouilles et l’entretien des catacombes. Les travaux de M. de Rossi n’ont pas été arrêtés, et, après neuf ans d’études et de recherches nouvelles, il publie aujourd’hui le troisième volume de sa Rome souterraine.

Ce volume achève de nous faire connaître le cimetière de Calliste, la plus vaste nécropole de Rome. M. de Rossi avait entrepris de l’explorer de préférence à tous ceux que recouvre la campagne romaine, parce qu’il fut, au IIIe siècle, plus important que les autres, et que les papes, depuis Zéphyrin jusqu’à Melchiade, ont voulu y être ensevelis. On sait quel a été le succès de son entreprise. Il espérait sans doute, quand il y pénétra pour la première fois il y a trente-cinq ans, que ses fouilles seraient heureuses et qu’il parviendrait à nous rendre quelques-unes des tombes célèbres que venaient si dévotement visiter les pèlerins du moyen âge ; mais on peut dire que son attente a été bien dépassée et qu’il y a fait plus de découvertes en ces quelques années que tous ses prédécesseurs depuis trois siècles. L’œuvre est terminée aujourd’hui. M. de Rossi nous a fait parcourir successivement toutes les galeries importantes dans ses deux premiers volumes, celles d’abord qui furent l’origine du reste et qu’on appelait au second siècle la crypte de Lucine, puis celles que Zéphyrin et Calliste firent creuser et qui devinrent le cimetière officiel de l’église romaine. On se souvient qu’il a été assez heureux pour retrouver, en les déblayant, la tombe de sainte Cécile et celles des papes. Il ne lui reste plus qu’à nous décrire quelques cryptes secondaires