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conduite du peuple italien, qui lui doit sa nationalité et ses libertés.

La situation que j’occupais, mes liens de famille, l’amitié d’enfance qui m’unissait à l’empereur, les missions que j’ai remplies, m’ont mis à même de bien connaître ces négociations.

J’ai toujours eu pour l’empereur, mon cousin, un dévoûment complet dont je crois lui avoir donné des preuves par la franchise de ma conduite ; par mon opposition même à tant d’actes de son gouvernement, rôle ingrat qui donne rarement le pouvoir et l’influence, et expose à toutes les calomnies. Ma seule satisfaction, je l’ai trouvée dans le sentiment du devoir accompli. Mon rôle personnel, tantôt effacé, tantôt prépondérant, a eu invariablement le même but : la grandeur de la France, poursuivre par l’alliance des Napoléons avec les idées démocratiques.


I

La guerre de 1866 entre l’Autriche, la Prusse et l’Italie, avait produit un trouble profond dans les relations internationales, tes victoires si rapides et si complètes de la Prusse modifiaient les rapports de toutes les puissances européennes. Après une pareille commotion, les grandes nations devaient se recueillir et chercher à rétablir leurs situations réciproques. Nous ne voulons ni exposer ni apprécier ici les diverses politiques que pouvait suivre Napoléon III. Nous nous bornons à constater celle qu’il adopta, dont voici les lignes générales :

Vis-à-vis de la Prusse, après avoir tenté vainement d’obtenir un agrandissement territorial en compensation des conquêtes énormes de cette puissance, la méfiance.

Vis-à-vis de l’Autriche, dont il avait empêché l’écrasement après Sadowa, la volonté de l’aider à se relever.

Vis-à-vis de l’Italie, une amitié constante. (Les victoires de la Prusse venaient en fait de donner la Vénétie à l’Italie, et la cession de cette province par l’Autriche à la France, qui la rétrocédait à l’Italie, ne s’explique que par des considérations d’amour-propre.)

Enfin, vis-à-vis des états romains, le désir d’évacuer Rome et de revenir à la convention du 15 septembre 1864, annulée par une nouvelle occupation.

L’empereur, par crainte du parti clérical, que son entourage lui représentait comme très influent, n’osait abandonner le pouvoir temporel du pape à Rome, et cependant, dans son opinion intime, il le condamnait. Cette conviction s’était formée chez lui par l’étude de la politique de Napoléon Ier et par ses souvenirs de jeunesse, alors que, parmi les insurgés italiens de 1831, il prenait part à la révolution contre le pape. Souvent Napoléon III se plaignait de la fatalité qui