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d’engouement, — la période d’achèvement, peut-être en même temps de découragement.

Aux débuts, la question du chois à faire entre l’état et les compagnies se pose devant les représentans du pays, l’industrie privée hésite, l’état seul s’engage et commence la construction des lignes qui, tracées les premières, desservent les points les plus riches du pays et donnent des résultats inespérés. Les compagnies se constituent, tous les états adoptent le système des concessions. En Belgique, en Allemagne, en Autriche, en Italie, on renonce à l’intervention de l’état ; souvent même les gouvernemens vendent les lignes qu’ils ont construites et les donnent en subvention aux sociétés qui offrent de construire des lignes nouvelles ; les artères principales des réseaux désignés en France sous le nom de chemins Autrichiens et de Sud-Autrichiens-Lombards sont des lignes vendues par les gouvernemens autrichien et piémontais. Cette seconde période s’achève aujourd’hui dans toute l’Europe, mais les populations réclament toujours des lignes nouvelles ; seulement il est difficile de trouver des compagnies solvables qui consentent à s’en charger.

La France, en adoptant le système des grands réseaux et des agglomérations puissantes, a réalisé une combinaison inespérée : les lignes riches déversent une partie de leurs recettes sur les lignes pauvres et aident ainsi à la création de ces dernières. La France a pu retarder pour plusieurs années le moment où commence la troisième période.

Construire des chemins de fer qui ne donneront rien, dont les produits, insuffisans pour rémunérer le capital consacré à leur construction, qui n’atteindront peut-être même pas les frais d’exploitation, est une œuvre que l’industrie privée sérieuse ne peut entreprendre et qui exige impérieusement l’intervention de l’état. Un chemin de fer augmente presque toujours dans une certaine mesure la richesse des régions traversées ; l’état peut trouver, dans l’augmentation des impôts directs ou indirects, une compensation aux sacrifices que nécessite la construction des lignes, mais cette compensation ne saurait être offerte à des actionnaires ou à des obligataires.

L’intervention de l’état dans la construction des lignes réclamées il y a trente ou quarante ans, dans la construction de celles que l’on achève ou que l’on demande aujourd’hui, s’expliqua donc très naturellement par des motifs purement financiers et en dehors de toute considération économique se rattachant à un système, quelconque d’exploitation, système édifié à grand renfort d’argumens produits, a posteriori.

Nous avons aussi, dans les l’enseignement relatifs à chaque nation européenne, constaté deux ordres de faits qui ont exercé une véritable influence sur la constitution actuelle des réseaux, —