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antarctiques, faisait luire l’espoir de certaines découvertes, de frappantes analogies et de remarquables différences promettant de jeter une nouvelle lumière sur la loi de la distribution des espèces végétales et animales à la surface du globe. Par-dessus tout, on attendait de l’étude du sol, de la rencontre de quelques débris, des indices de l’état d’une partie du monde pendant les âges antérieurs.

La commission instituée en vue de l’observation du passage de Vénus songeait à tirer tout le profit possible des expéditions lointaines qu’elle avait à préparer. Les intérêts des sciences naturelles étaient confiés à M. Milne Edwards. Sous le patronage de l’illustre savant, un jeune naturaliste qui avait donné des preuves d’activité, de savoir et de talent d’observation, M. Henri Filhol, fut attaché à la mission de l’Ile Campbell, conduite par un habile ingénieur de la marine, M. Bouquet de la Grye. Après s’être livré à l’exploration de l’île Campbell, le naturaliste devait visiter les îles Auckland, l’île Stewart, la Nouvelle-Zélande. Il fallait constater les rapports de ces différentes terres, rechercher si des faits ne témoignent pas de ruptures survenues en des temps reculés. A résoudre des problèmes que suggère la condition actuelle des îles australes, M. Henri Filhol a mis infiniment d’intelligence ; il a recueilli un ensemble d’informations neuves. Avant d’en montrer le caractère, il importe de résumer les connaissances antérieurement acquises sur la Nouvelle-Zélande et les îles qui en sont plus ou moins voisines. L’histoire de la Nouvelle-Zélande, faite d’études et d’observations fort diverses qu’on n’a point encore rapprochées, offre tous les genres d’intérêt. La première page de cette histoire fut écrite, il n’y a guère plus d’un siècle ; on écrira la dernière avant la fin d’un autre siècle. Alors, en effet, tout aura changé sur les terres dont le capitaine Cook et ses compagnons firent entrevoir les aspects, dont plusieurs explorateurs présentèrent ensuite des tableaux sombres ou attrayans. Les magnifiques forêts vierges, déjà bien endommagées, seront remplacées par des herbages et des champs de céréales ; les animaux remarquables et particulièrement caractéristiques seront détruits ; les anciens possesseurs du sol, qu’on appelait les sauvages, compteront parmi les races éteintes. A la nature primitive aura succédé la vie d’une nation européenne ; seules, quelques plantes et quelques chétives espèces animales, reléguées dans des endroits d’accès difficile, diront à l’investigateur attentif qu’il est aux antipodes de notre pays. L’heure est bonne pour retracer les événemens survenus à la Nouvelle-Zélande, — nous avons pu en connaître des témoins, — pour apprécier le caractère, les mœurs, les idées, les aptitudes d’un peuple primitif existant dans une entière indépendance, — ce peuple amoindri, refoulé entre certaines limites, modifié par le