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contre-poids sur la nouvelle magistrature, et de compter simplement quelques employés européens de plus à son service. Cet espoir a été déçu. Grâce au soin apporté par les diverses puissances dans le choix de leurs représentans, le nouveau corps judiciaire, auquel a été assez heureusement appliqué le nom de conseil amphictyonique, a surpris tout le monde par la manière élevée dont il a compris son rôle et la fermeté dont il a fait preuve en toute occasion[1]. Ce n’était pas une tâche facile que de mettre en mouvement toute la machine, avec son personnel inexpérimenté, ses rouages mal ajustés, sans connaître encore ni sa force d’action, ni sa force de résistance. On y parvint cependant. La cour, d’accord avec les tribunaux de première instance, s’occupa tout d’abord d’arrêter les dispositions du règlement général dont la rédaction lui avait été réservée par l’article 37 de la convention ; puis elle dressa la liste des officiers qui devaient l’aider dans sa tâche, fit la distribution des rôles entre les divers magistrats du parquet et désigna les juges chargés des fonctions spéciales de conciliateurs. Le 15 février 1876, chacun était à son poste et la justice à l’œuvre.

Le nombre des affaires devait bientôt à lui seul démontrer la nécessité de la création récente. Du 15 février au 31 octobre 1876, le tribunal d’Alexandrie jugea 1,407 affaires, dont 47 en référé, et rendit en outre 1,033 décisions sommaires. Il restait encore à son rôle 700 affaires. Le tribunal du Caire rendit dans la même période 889 jugemens ordinaires et 722 sommaires. Les chiffres d’Ismaïlia sont notablement inférieurs, 523 affaires en tout, et quiconque a erré comme nous dans les rues désertes et brûlées de cette bourgade doit se demander à quoi elle doit l’honneur de posséder un tribunal. Quant à la cour d’Alexandrie, elle avait rendu, entre le 15 février et le 1er juillet, 85 arrêts en matière ordinaire, et son rôle était très chargé. La nouvelle juridiction inspira dès le début une confiance si complète que non-seulement les étrangers s’y soumirent sans, peine pour les procès mixtes, mais que les indigènes imaginèrent toute sorte de biais pour porter devant elle leurs contestations placées hors de sa compétence. Cette affluence des affaires n’a fait que s’accroître, et l’insuffisance du personnel n’a pas tardé à devenir évidente. Le ressort du Caire, par exemple, s’étend

  1. Le personnel se compose en tout de 29 étrangers et 18 indigènes. La Belgique, l’Autriche, la France, l’Italie, l’Allemagne, l’Angleterre, la Hollande sont représentées chacune par trois membres ; l’Amérique, la Russie, la Suède, la Grèce par deux, le Danemark par un seul. Les trois magistrats français sont MM. Letourneux, vice-président adjoint de la cour d’appel, M. Herbout, juge au tribunal du Caire, M. Alfred Vacher, avocat-général à la cour d’appel.