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sauf les vins. Au retour, on importe de la farine, du blé, du cuivre, des fanons de baleine, du pétrole, du bois, du lard, du suif, des viandes salées, du tabac. Les passagers sont encore le meilleur colis de ces navires, et rien n’a été épargné à bord pour leur bien-être et leur sécurité. Les paquebots de la compagnie française font le service de la poste et sont subventionnés par l’état ; ils sont commandés par des lieutenans de vaisseau de la marine militaire ou des capitaines de la marine marchande. Les uns et les autres sont de braves officiers, sûrs, éprouvés, rompus à toutes les dures fatigues de l’Océan. Les paquebots les plus grands, la France, l’Amérique, ont 125 mètres de long, avec une largeur de 13m,40, une profondeur verticale de 10m,85, et un tirant d’eau à la ligne de flottaison de 7m,30. Ce sont les Léviathans de la mer, et les dimensions ne pourraient guère en être augmentées utilement. M. Daymard, ingénieur de la marine, chef du service technique de la compagnie transatlantique au Havre, s’est livré à ce sujet à des calculs convaincans. Il a démontré qu’une longueur de 130 mètres, avec un déplacement en charge de 8,500 tonneaux, ne saurait être impunément dépassée, et que sans parler du Great-Eastern, des navires comme ceux de quelques compagnies anglaises, le Germanie, qui a 142 mètres, ou le City of Berlin, qui en a 149, naviguent assez difficilement et exigent de trop fréquentes réparations.

La machine d’un paquebot comme l’Amérique développe une force de 2,600 chevaux, consomme 70 tonnes de charbon par jour, ou un peu plus d’un kilogramme par heure et par force de cheval, au lieu de deux kilogrammes que l’on brûlait naguère, avant l’adoption des machines compound. Il y a ainsi double économie, d’abord dans l’emploi du combustible, ensuite dans la place utile qui est restée libre pour le fret, puisqu’on emporte moins de charbon. Ces paquebots sont montés par 140 hommes d’équipage, et peuvent loger 800 passagers ; quand on les compare à une petite ville flottante, on fait mieux qu’une figure de rhétorique, on ne dit que la vérité. Ils ont une capacité disponible totale de 6,000 tonneaux, dont les trois cinquièmes sont affectés aux machines, au charbon, aux vivres, au lest ; ils partent du Havre avec 2,000 tonneaux de fret payant, retournent quelquefois avec 3,000. Ils se meuvent sur l’Océan avec une vitesse de 13 à 15 milles, soit 24 ou 28 kilomètres à l’heure : c’est la vitesse d’un train de marchandises sur. une voie ferrée. Ni les vents ni les vagues ne les arrêtent ; ils marchent contre l’ouragan et la mer démontée, partent et arrivent à date fixe.

D’autres lignes de paquebots, moins importans, mais non moins bien aménagés, dépendent du port du Havre : les uns font les voyages du Canada, des Antilles, du Mexique ; les autres