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de leur église. Il est digne d’attention que ces aides étaient payées par tous ; les seigneurs les devaient à leurs suzerains, aussi bien que les serfs et vilains à leurs seigneurs. Les ecclésiastiques n’en étaient pas plus exempts que les laïques. Ce genre d’impôt ne connaissait aucune distinction de classes ni de terres. L’origine en est fort obscure. Il semble bien, à considérer leur universalité, qu’on puisse voir dans les aides les vraies contributions publiques du régime féodal. C’est probablement sous cette forme que les hommes du moyen âge ont pratiqué le principe que tous les sujets doivent contribuer aux dépenses extraordinaires du gouvernement et même à celles de l’homme qui gouverne. M. Vuitry pense, avec une grande apparence de raison, que c’est de l’aide féodale que devait sortir un jour l’impôt royal et, avec lui, tout le système des contributions publiques de la société moderne.

Les rois du XIe siècle, les premiers Capétiens, n’étaient que des seigneurs féodaux. Cette proposition, qui serait fort incomplète au point de vue politique, paraît tout à fait exacte au point de vue financier. On ne voit pas, en effet, que le roi levât d’autres impôts que ceux que les seigneurs avaient également le droit de percevoir. Ses ressources consistaient uniquement dans ce qu’on appelait son domaine. Or ce mot avait le même sens quand on l’appliquait au roi que lorsqu’on l’appliquait à quelque seigneur ; il désignait trois choses : 1° les fruits et revenus des terres réservées ; 2° les redevances des terres en censive ; 3° les revenus divers auxquels donnaient lieu les terres en fief. Le roi percevait donc, comme tout autre seigneur, les cens, les champarts, les corvées de ses serfs et vilains, le formariage et la mainmorte de ses serfs, la taille arbitraire ou abonnée, les lods et ventes, le relief et le quint, enfin l’amortissement, qui pour certaines catégories de terres tenait lieu des droits de mutation. Tout cela lui était dû à titre de propriétaire direct et comme prix de la jouissance qu’il accordait de sa terre soit en fief, soit en censive. Il possédait de même les impôts auxquels nous avons dit qu’un caractère public était attaché ; mais il ne les possédait que sur ses terres propres, comme les autres seigneurs sur les leurs. Il percevait donc les amendes et forfaitures, les droits de greffe et de sceau, le droit de prise et de gîte ou les redevances fixes par lesquelles certaines villes s’en étaient rachetées, les péages aux ponts et sur les routes, les douanes et tonlieux, non pas aux frontières du royaume, mais aux limites du domaine propre, les taxes sur les marchandises qui étaient vendues dans les marchés de la terre du roi, les fours et moulins banaux, le droit de monnaie, c’est-à-dire le droit de changer la monnaie ou bien de se faire payer un fouage pour ne pas l’altérer, enfin l’aide féodale dans des cas exactement semblables à ceux où les seigneurs y