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2° Les divers grades et emplois, des cadres inférieurs resteraient à la nomination des chefs de corps, qui délivreraient aux promus un titre formant brevet. Et à ce sujet je fais ici une réflexion : dans l’armée française, l’institution très ancienne, et à mon avis très utile, des brevets, — titres consécrateurs de la collation du grade, a disparu. Ils étaient attribués aux officiers nommés ou promus, qui ne reçoivent aujourd’hui qu’une lettre d’avis manuscrite. Les sous-officiers, en dehors de leur feuille de congé de libération, en tous points semblable à celle des soldats, où sont mentionnés très sommairement les services du titulaire, ne reçoivent aucun titre spécial de promotion qu’ils puissent tenir à honneur de faire entrer dans les archives de la famille.

3° La cassation ne pourrait plus être prononcée que sur l’avis d’un conseil de discipline, par le chef de corps pour les sous-officiers servant à titre d’appelés, par le général de division pour les sous-officiers servant à titre de rengagés.

Enfin je demanderais expressément que la rétrogradation disparût de la nomenclature des procédés de répression applicables aux sous-officiers. Ce principe est l’une des erreurs de nos vieux règlemens. Un sous-officier à demi cassé ne sert qu’avec dégoût dans la condition diminuée à laquelle il est publiquement réduit, et, vis-à-vis de ses sous-ordres, cette diminution lui retire trop d’autorité morale pour qu’il puisse commander utilement.

De ces dernières propositions, une seule, celle qui institue des conseils de discipline appelés à connaître des manquemens graves qui peuvent entraîner la perte du grade, trouverait sa place dans une loi sur l’état des sous-officiers. Les autres sont d’ordre administratif, et c’est au ministre de la guerre qu’il appartient de les introduire dans la pratique de l’armée par la voie des règlemens.

Dans ma pensée, la loi sur l’état des sous-officiers, résumant les dispositions de la législation très décousue qui prévaut aujourd’hui, comprendrait : 1° celles qui concernent le rengagement (droit aux indemnités de rengagement, aux hautes paies graduées, à la pension proportionnelle de retraite, — loi du 10 juillet 1874) ; 2° l’institution des conseils de discipline, statuant par voie d’avis préalable sur tous les cas de démérite grave ou d’indignité (cassation) ; 3° le règlement des droits des sous-officiers libérés à des emplois civils. On voit que la loi sur l’état des sous-officiers, ainsi entendue, serait à la fois claire et simple.

J’envisage à présent la condition des sous-officiers sous l’aspect particulier, très important, des moyens à employer pour rétablir entre eux et les soldats, dans les différentes circonstances de leur vie commune, les lignes de démarcation que le temps, l’indifférence et le laisser-aller ont presque effacées.