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l’adresse de se rendre favorable, fut proclamé roi des Zoulous. Les boers, maîtres enfin du territoire qu’ils avaient entrevu du haut du Drakenberg, fondèrent la ville de Pietermaritzburg, ainsi nommée en l’honneur de deux de leurs chefs, Pieter Retief et Gert Maritz, qui avaient succombé comme Moïse avant d’arriver sur la terre promise ; leur gouvernement, dont Pretorius restait le chef, prenait le titre de Société sud-africaine de Port-Natal.

Ceci se passait en 1840. Depuis six ans, les boers erraient dans les régions inconnues de l’Afrique australe, semblables aux Hébreux dont la lecture de la Bible leur rappelait chaque soir les pérégrinations. Devenus possesseurs d’un territoire riche et fertile, étaient-ils enfin au terme de leurs aventures ? Lorsqu’ils croyaient s’être affranchis de la souveraineté britannique, les autorités du Cap montrèrent que l’on pensait encore à eux. En apprenant les résultats de cet exode, le ministre des colonies à Londres fit savoir que le gouvernement ne tolérerait pas que ses sujets érigeassent un état indépendant sur la frontière. En conséquence, le gouverneur, sir George Napier, eut ordre d’envoyer une garnison à Natal. Quelques centaines d’hommes, sous le commandement d’un capitaine, y débarquèrent au mois de mai 1842. Les boers, fort mécontens de cette intervention, prétendant même qu’ils entendaient se constituer en république sous le protectorat du roi de Hollande, qui ne leur avait toutefois donné aucun encouragement, les boers reçurent à coups de fusil les soldats anglais, puis ils les bloquèrent dans leur camp. Un émissaire put en aller porter la nouvelle au Cap. Des renforts arrivèrent bientôt ; la ville de Pietermaritzburg fut occupée, et les émigrans, reconnaissant qu’ils n’étaient point les plus forts, acceptèrent la suprématie du gouvernement britannique ; mais cela ne faisait pas l’affaire de ceux qui avaient rêvé de devenir indépendans. Les insoumis, Pretorius entre autres, repassèrent le Drakenberg pour se répandre dans les régions qui forment aujourd’hui les états d’Orange et de Transvaal.

L’esprit d’indépendance dont les boers étaient animés, la vie pastorale à laquelle ils s’adonnaient, étaient inconciliables avec l’idée d’un gouvernement unique. Chaque famille se dirigeait à sa fantaisie ; tout au plus marchaient-ils par petites bandes, afin de se trouver en force contre les natifs. Quelques-uns s’avancèrent ainsi vers le nord où ils fondèrent la ville de Potchefstrom sur la rive gauche du Vaal. Ayant appris qu’une ordonnance du gouverneur du Cap prétendait assujettir aux lois de la colonie tous les Européens résidant en deçà du 25e degré de latitude, ils émigrèrent encore plus loin. Zoutspanberg et Leydenburg datent de cette époque. À cette distance de la côte méridionale, séparés des vieilles provinces par d’immenses espaces presque déserts, ils comptaient vivre