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insignifiant : 15,000 têtes de bétail furent enlevées en une seule expédition. Si la punition fut sévère, du moins elle fut efficace. Depuis cette époque la frontière orientale de la colonie a été paisible. Les gouverneurs qui se sont succédé à Cape-Town ont pris pour règle de conduite d’améliorer le sort des indigènes, de les amener par des efforts graduels à un meilleur état de civilisation. Ils y ont réussi ; les Cafres sont devenus des voisins tranquilles ; ils achètent les marchandises anglaises ; ils fournissent à la colonie de bons ouvriers. Dans l’Afrique australe, de même qu’en d’autres points du globe, les populations indigènes semblent s’être réconciliées avec le gouvernement britannique.


II. — L’EXODE DES BOERS.

Tandis que la frontière orientale était ravagée par de fréquentes incursions des Cafres, vers le nord au contraire les colons jouissaient d’une sécurité relative. Au-delà du fleuve Orange, qui formait la limite naturelle, vivaient des tribus adonnées à la chasse, nomades, se battant souvent entre elles. C’étaient des Zoulous, des Bechouanas, des Basoutos, des Bushmen ou Boschimans. Vers le commencement du siècle, la place leur avait été disputée par les Griquas. Ces Griquas avaient été visités par les missionnaires ; ils en avaient reçu les premières notions de la vie civilisée, ils s’étaient presque fixés à demeure entre le fleuve Orange et son affluent la Modder, dans une région bien arrosée, riche en pâturages et en terres arables. En 1825, dans un été de sécheresse extrême, les fermiers franchirent l’Orange avec leurs troupeaux. Bien accueillis par les Griquas, ils revinrent, et peu à peu quelques-uns y créèrent des établissemens durables. Le commissaire-général Stockenstrom voulut s’y opposer ; personne ne l’écouta. Au surplus le gouvernement britannique ne voyait aucun motif sérieux d’entraver ce mouvement d’expansion, dont l’importance était vraiment insignifiante.

En 1833 et 1834, un plus grand nombre passèrent la frontière, la plupart sans esprit de retour. Les boers étaient très mécontens. L’abolition de l’esclavage menaçait de leur enlever leurs meilleurs serviteurs. Les déprédations des Cafres décimaient leurs troupeaux. N’était-il pas naturel de tenter fortune ailleurs ? Le gouvernement du Cap leur déplaisait ; n’étaient-ils pas libres d’en établir un autre à leur convenance dans les provinces vacantes de l’intérieur ? Ils l’a vouaient tout crûment : Nous allons, disaient-ils, chercher de l’herbe et la liberté. Sur la question qui lui en fut faite par sir B. Durban, le premier magistrat de la colonie déclara qu’aucun article de loi