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on craignait en allant jusqu’à Lyon de céder trop de terrain aux influences allemandes et de reculer devant elles. Ces sentimens, malgré ce qu’ils offraient de généreux, ont conduit à une fâcheuse résolution. Le vrai et le seul moyen de lutter efficacement contre les facultés d’outre-Rhin, c’est d’élever sur le territoire français des facultés douées de tous les ; élémens de vie scientifique et pouvant prospérer dans un milieu favorable. Ces conditions, on les rencontrait sûrement à Lyon ; elles faisaient défaut à Nancy. On pouvait bien créer à Nancy une faculté de médecine pourvue de laboratoires de physique, de chimie, de physiologie, d’histologie, dotée même d’un institut anatomique bien aménagé ; mais ce qui manquait, et ne pouvait être créé à volonté, c’étaient de vastes hôpitaux et des services hospitaliers actifs pour les professeurs de clinique et autres professeurs de la faculté. L’administration municipale de la ville faisait à ce sujet les plus belles promesses ; elle s’engageait à édifier un nouvel hôpital pourvu de tout ce qui peut servir à l’enseignement. Ces promesses n’ont pas été tenues : le seront-elles jamais ? Et d’ailleurs la construction d’un nouvel hôpital à la place des vieux et insalubres hôpitaux de la ville amènera-t-elle un beaucoup plus grand nombre de malades, et assurera-t-elle ce renouvellement incessant de faits pathologiques sans lesquels l’instruction médicale doit languir ?

En outre, les traditions manquent à cette faculté hâtivement instituée. Ce n’est pas du jour au lendemain que l’on crée un centre d’instruction médicale et d’activité scientifique. Il y faut le temps et l’appel continu de maîtres renommés. La faculté de médecine de Strasbourg avait été longtemps à se créer cette tradition et à affirmer sa valeur. Elle n’avait même trouvé la prospérité que lorsque l’administration de la guerre lui avait rattaché l’école de santé militaire. Les étudians militaires vinrent donner à la faculté alsacienne une vie et une animation qu’elle ne connaissait pas. L’école militaire de santé est tombée ; peut-être pourrait-on la relever avec fruit, et la rattacher, comme l’ancienne, à cette faculté de Strasbourg transférée à Nancy. Il y aurait là, pour cette faculté, une source de prospérité qui la ranimerait sans doute, et la ferait sortir de son état de langueur. Il n’y a pas à se dissimuler toutefois que l’intérêt de l’école militaire, si on la relevait, ne concorderait pas de tout point avec l’intérêt évident de la faculté de Nancy ; l’école pourrait trouver ailleurs un milieu plus favorable, et on ne saurait en vouloir à l’administration de la guerre d’écouter surtout les intérêts de son école de santé.

Trois nouvelles facultés de médecine ont été décrétées ; deux, celles de Lyon et de Bordeaux, par la loi du 8 décembre 1874, et à la suite d’un remarquable rapport de M. Paul Bert, celle de Lille