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universités dont les membres vont accroître et enrichir les principales académies des départemens. Une grande académie doit être le couronnement naturel d’une grande université ; toutes deux doivent se soutenir et se vivifier l’une par l’autre.


I

En parcourant leur histoire, nous ne trouvons pas seulement des titres, mais aussi des précédens en faveur de cette alliance que nous désirerions leur faire contracter avec l’Institut. Faites à l’image de l’Académie française et de l’Académie des Sciences, animées de leur esprit, elles datent déjà de près de deux siècles, surtout si on remonte aux sociétés particulières et privées où, comme l’Académie française, elles ont pris naissance. Quant à leur existence officielle par lettres patentes du roi, la plupart des anciennes académies de la province sont de la fin du XVIIe ou du commencement du XVIIIe siècle. Quelques-unes seulement, plus récentes, n’ont précédé la révolution que d’un petit nombre d’années. Fidèles à leur mission, elles n’ont pas cessé d’entretenir et d’exciter autour d’elles, dans les capitales de nos anciennes provinces, le feu sacré, le goût et le culte des ouvrages de l’esprit, des sciences, des beaux-arts et des belles-lettres. C’est à leur généreuse initiative que dans la plupart de nos villes revient l’honneur de la fondation des musées, des bibliothèques, des cabinets de médailles, des jardins botaniques, des cabinets d’histoire naturelle, des observatoires.

Pour ne pas parler de leurs séances solennelles, de leurs travaux et de leurs publications, leurs concours littéraires, leurs sujets de prix, les noms et les ouvrages des concurrens, mériteraient à eux seuls une place dans l’histoire de la littérature française. C’est à l’occasion d’un prix proposé par l’académie de Dijon que Rousseau entre en lice et révèle son génie. Bordeaux couronne Mairan, Marseille Chamfort, Lemontey et Delille. À la veille même de la révolution, Bonaparte et Daunou concouraient pour le prix fondé par Raynal à l’académie de Lyon. Au commencement de ce siècle, MM. Guizot et Mignet débutaient par un prix de l’académie de Nîmes, et M. Thiers par un prix de l’académie d’Aix.

En parcourant la France littéraire, qui est l’annuaire des sociétés savantes de la seconde moitié du XVIIIe siècle, on peut voir combien étaient alors recherchés les honneurs et les sièges académiques de la province. Les plus grands personnages, des princes du sang, des ministres, des gouverneurs, des cardinaux, et le roi lui-même, figurent en tête des listes de leurs membres comme protecteurs, directeurs ou membres honoraires. Je remarque aussi le nombre des académiciens de Paris qu’elles contiennent. Les plus illustres étaient flattés d’appartenir comme associés à telle ou telle