sans doute, mais qu’on a surtout aggravée en l’engageant au-delà de toute mesure, c’est assez apparent. On le distingue à son accent dans les entrevues récentes qu’il a eues avec des sénateurs, des députés républicains qui sont allés lui porter les doléances du commerce et de l’industrie des contrées qu’ils représentent. C’est l’accent sincère, ému, perplexe, d’un homme qui veut le bien, qui l’entend peut-être un peu à sa manière, et qui ne serait pas fâché surtout de voir clair dans une de ces crises qu’il est plus facile de déchaîner que de dominer. Le malheur de M. le maréchal de Mac-Mahon, c’est de s’être trop laissé répéter et d’avoir peut-être fini par croire qu’il est au pouvoir pour un parti, pour certaines opinions, qu’il a reçu une mission particulière en dehors ou au-dessus de la constitution, qu’il se doit à lui-même, qu’il doit aux engagemens dont on le trouble, de revendiquer une autorité privilégiée, un droit personnel au nom duquel il pourrait tenir tête à tous les autres pouvoirs. C’est l’explication de ses anxiétés d’esprit, de ses contradictions, de ses brusques oscillations entre toutes les influences, lorsqu’il n’aurait dû jamais consulter que sa loyauté, la gravité des circonstances, et son devoir de chef constitutionnel disposé à se plier, sans s’abaisser en aucune façon, aux règles parlementaires.
Au fond, dès le premier instant, il n’y avait évidemment pour M. le maréchal de Mac-Mahon que deux solutions possibles. L’expédient du cabinet d’affaires du 23 novembre était trop tardif et se produisait sous une forme trop insuffisante pour avoir un caractère sérieux. Ce malheureux cabinet n’a été, il ne pouvait être qu’un intermède, et il a duré beaucoup, puisqu’il a vécu vingt jours! En dehors de cet expédient, nécessairement effacé et éphémère, M. le président de la république n’avait à choisir qu’entre deux combinaisons. En réalité, c’est entre ces deux combinaisons que la lutte est engagée depuis un mois, ou, pour mieux dire, la seule question agitée depuis les élections a été celle de savoir si on aurait un ministère régulier, parlementaire, représenté par M. Dufaure, ou si on reviendrait à un cabinet de la droite, à la politique de résistance et de combat, avec toutes les chances qui s’attachaient fatalement à une telle décision. Jusqu’à la dernière heure, M. le président de la république est resté visiblement livré à toutes ses perplexités, à toutes ses hésitations. Après avoir appelé une première fois, il y a huit jours, M. Dufaure, après avoir paru s’entendre avec le plus éminent et le plus respecté des hommes du parlement, M. le maréchal de Mac-Mahon s’est arrêté tout à coup. Un malentendu a éclaté brusquement, même un peu trop brusquement, au sujet du choix du ministre des affaires étrangères, du ministre de la guerre et du ministre de la marine que le chef de l’état revendiquait comme un privilège personnel. C’était le droit parlementaire remis en question, tout se trouvait plus que jamais compromis. Peut-être aussi la difficulté a-t-elle été aggravée par la divulgation hâtive du conflit, par une de ces notes qu’on