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Dépêche-toi, allons ! — Le miroir répond : — Je me regarde au miroir. — En somme, tous les meubles, les uns après les autres, les outils et les serrures de la chambre trouvaient des biais pour ne pas dénoncer Persillette, qui s’était sauvée avec son jeune gars. Seulement la caisse aux balayures se mit à brailler : — Ce n’est pas vrai ! ce n’est pas vrai ! Persillette n’y est plus, elle est par les champs avec son bon ami qui l’emmène. » À ce discours, la Cathò et l’ogre, figurez-vous dans quel état ils demeurèrent. La Cathò dit : « Cours, mon homme, cours ! Avec tes grandes jambes, tu la rejoindras en deux sauts. Oh ! coquins ! Ils me l’ont faite (ils m’ont jouée). » Et pendant que l’ogre poursuivait ces deux malheureux, la caisse aux balayures goguenardait : « Pauvre maîtresse ! vous l’avez vu, le fagot ? vous l’avez vu, le petit cochon ? C’était lui, son bon ami ! Et vous ne vous en êtes pas doutée. Tous ont eu des macaronis pour vous dire des mensonges, à moi rien, et les mensonges, je ne vous les dis pas. » Et la Cathò, en entendant raconter comment s’en était allée Persillette, ne pouvait se calmer, ne pouvait pas. Cependant l’ogre, à force de courir, était arrivé à les voir de loin, Persillette et son jeune homme, et s’évertuait à les rejoindre et à les rattraper. Persillette dit : « Giannino, je sens un froid dans le dos. — Mets ton châle, — dit-il. Persillette répond : — C’est pour sûr mon père ; s’il nous prend, pauvres nous… Mais attends, je vais l’arranger. » Et en parlant ainsi, elle tire de son giron le roseau avec les poux et souffle dedans contre l’ogre, si bien que pousse un buisson démesurément haut et large qui paraissait une forêt d’épines. Et quand l’ogre y fut arrivé, il ne vit plus rien, et il ne put passer à travers, et il dut rebrousser chemin. La Cathò lui dit : « Eh bien donc ? — L’ogre dit : — Quand j’étais sur le point de les attraper tous les deux, ils me sont disparus, parce que j’ai trouvé un buisson d’épines qui fermait toute la route, et il n’y avait point de trou pour passer outre. La Cathò s’écrie : « Oh ! moi, malheureuse ! C’est moi qui lui ai appris ces maléfices. Ce sont mes poux du roseau. Cours, cours, mon homme ! tu es toujours à temps pour les rejoindre. »

« Et l’ogre partit. Et après un bon moment, voilà qu’il revit Persillette avec son bon ami qui marchaient. Persillette dit : « Giannino, je sens un froid dans le dos. — Couvre-toi mieux, dit-il. — C’est que c’est mon père, c’est l’ogre qui est derrière nous. Mais j’ai encore un remède. » Et avec la baguette enchantée elle se changea en église, et son jeune homme était le prêtre qui se préparait dans la sacristie pour dire la messe. Elle fit ensuite apparaître un petit garçon qui gardait les moutons sur le pré, devant l’église. Voici que l’ogre arrive, et il demande aussitôt à ce gardeur de moutons : « Dis donc, valet, as-tu vu deux (jeunes gens) qui étaient ensemble, un jeune homme avec une fille ? — Et le gardeur de montons : —