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desséchée, et que, par suite, la spéculation présenterait, après d’énormes dépenses, bien peu d’avantages. Narcisse avait sa réponse toute prête : on devait attendre, put-il dire, que le premier abaissement du lac fût terminé ; alors il établirait plus bas une autre prise d’eau et tout un nouvel appareil. Bien mieux, il avait préparé à l’avance cette seconde opération. Pour répondre aux médisances, il n’avait eu qu’à chercher un moyen de montrer dès maintenant aux yeux de tous que les eaux, une première fois abaissées, trouveraient une autre ouverture plus bas encore. Les débris de ses constructions ont fait voir, disions-nous, que le bassin hexagonal, où le petit canal riverain amenait les eaux, était de 5m,48 plus élevé que le bassin trapézoïde, placé immédiatement en aval, et destiné à les introduire dans l’émissaire même. On a trouvé en outre une galerie sous ce bassin, galerie communiquant en amont, c’est-à-dire vers le lac, avec un puits qui remontait vers le petit canal d’ouverture. Rien de plus naturel que de penser que ces travaux faits après coup sont précisément ceux auxquels fait allusion Tacite. Narcisse aura supprimé la différence de niveau, aux yeux de ceux que la chute de l’hexagonal dans le trapézoïde aurait déjà dû convaincre, en faisant construire sous le premier de ces deux bassins une galerie couverte, où il aura amené les eaux par le puits qu’on a pu voir muni encore des rainures destinées à ses vannes. Il n’y a pas besoin d’être bien expérimenté dans la science hydraulique pour comprendre que, pendant toute la durée d’une opération telle que l’écoulement d’un grand lac, l’ingénieur est toujours en présence d’un cône formé d’un côté par la ligne de la rive, qui se découvre lentement, et de l’autre côté par la ligne inclinée des conduits provisoires entraînant les eaux vers la galerie définitive. Ces conduits ou canaux sont naturellement destinés à être détruits dès que le niveau du lac s’est abaissé jusqu’à leur orifice et à être remplacés par d’autres conduits posés plus bas ; en même temps le cône, tranche par tranche, se trouve diminué, jusqu’à ce que soit atteinte la pente minima à donner aux ouvrages précédant l’émissaire. Narcisse avait placé au niveau définitif le radier du bassin trapézoïde ; et les 5m,48 qu’avait de plus en hauteur le bassin hexagonal représentaient, sauf la pente définitive à conserver, l’élévation du cône dont il comptait se défaire pour abaisser le lac de 5 mètres environ. C’est ce qu’il rendit visible à l’avance en amenant les eaux dans le nouveau canal creusé au-dessous du bassin hexagonal ; ce travail pouvait bien s’accomplir en quelques semaines, puisqu’il se faisait à ciel ouvert sur une longueur de 28 mètres seulement. La preuve était donnée qu’en peu de temps une quantité notable de terres reconquises à l’agriculture s’ajouterait à celle qu’on avait trouvée insuffisante. La hauteur que l’ingénieur avait assignée à la tête de