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s’empara de l’armée de Vercingétorix, et, à la faveur de la nuit, elle s’enfuit en désordre vers Alise, oppide éduen, ou plutôt mandubien, mais dépendant du canton éduen qui se trouvait à quelques lieues de là. César vit tout de suite qu’il pouvait achever la campagne en les resserrant dans cette place. L’après-midi du jour suivant, il arrivait lui-même devant l’oppide immortalisé par l’héroïsme de ses défenseurs.

Nous voici de nouveau en présence d’un problème historique. Est-il certain que l’Alise où se décida le sort de la Gaule soit cette Alise-Sainte-Reine, située dans la Côte-d’Or, à quelques lieues de Semur, et qu’une tradition séculaire a identifiée avec l’oppide de Vercingétorix ? L’érudition franc-comtoise, fortifiée par les savantes recherches de M. J. Quicherat, s’est prononcée pour une autre localité du nom d’Alaise située dans la Franche-Comté, à six lieues au sud de Besançon. Cependant les travaux ultérieurs ont toujours plus confirmé les prétentions de l’Alise bourguignonne, et il n’y a que justice à rappeler la brillante et concluante étude de M. le duc d’Aumale, publiée dans la Revue du 1er mai 1858, parmi les pièces les plus probantes du procès instruit au sujet du dernier grand boulevard de l’indépendance gauloise. Tout, depuis, n’a fait que fortifier les aperçus et les raisonnemens de l’illustre écrivain. Le nom d’Alise, qui signifie un lieu élevé, se retrouve à peine modifié au nord et au midi de l’ancienne Gaule, à Alais (Alesia nova, Gard), à Aleth (Aude), Alet, près de Saint-Servan, Château-Chinon (Alisincum), etc.

La solution de cette question dépend en grande partie de l’emplacement qu’il faut assigner à ce grand combat de cavalerie que nous venons de raconter. Or de nombreux indices concourent à le fixer sur l’Armançon, non loin de Senailly, qui est lui-même à 24 kilomètres d’Alise. Les traditions locales sont pleines des souvenirs de combats sanglans entre Gaulois et Romains. On ne cesse de découvrir dans les environs des amas d’ossemens d’hommes et de chevaux. Une plaine riveraine de l’Armançon se nomme le Champ de bataille, et, détail très significatif, une route qui contourne les hauteurs voisines s’appelle encore aujourd’hui la Voie des Allemands. Cela admis, quand on voit les Gaulois se réfugier en toute hâte dans l’oppide d’Alise, où César arriva lui-même dès le soir du lendemain, il ne faut pas chercher trop loin leur lieu de refuge, et Alise-Sainte-Reine répond seule aux données du problème ainsi posé.

Ajoutons que sa situation, les ruines encore visibles, les deux rivières, l’Oze et l’Ozerain, arrosant les deux vallées qui longent le mont Auxois sur lequel elle est bâtie, et se jetant dans la Benne à quelques lieues de là, tout confirme la tradition locale. On a