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tout ce qu’on me mande au contraire, parce qu’on se fonde sur les apparences… » — « Malgré tout ce que l’on me mande que fait le coadjuteur contre moi, écrivait-il d’Épernay le 3 janvier à un de ses confidens, je le crois de mes amis, et qu’il a toutes les bonnes intentions pour moi que je puis souhaiter… Il est vrai qu’il y a deux puissantes raisons qui l’obligent à cela, qui sont la parole qu’il en a donnée à la reine et son intérêt, lequel plus que jamais se rencontre avec le mien[1]… »

«… Il faut, écrivait-il de Pont-sur-Yonne à l’abbé Fouquet le 11 janvier, que M. le coadjuteur prenne ses résolutions pour de bonne heure, et il me semble qu’ayant le roi de son côté, étant assuré que j’entreprendrai tout hardiment pour l’appuyer avec la quantité d’amis que lui et Mme de Chevreuse ont, et agissant de concert avec le prévôt des marchands, qui a bonne intention, et avec M. le maréchal de l’Hospital (gouverneur de Paris), qui est fort zélé pour le service du roi, il se peut mettre en état de rompre aisément toutes les mesures de son altesse royale… (c’est-à-dire les résultats de sa liaison avec M. le prince). » Le 16 janvier, il écrivait de Châteaurenard à ce même abbé : «… Le coadjuteur doit être en repos pour le secret, car je suis persuadé, aussi bien que lui, que ce serait le mettre dans l’impuissance de servir, si on en usait autrement et qu’on découvrît notre intelligence… » Le 18, il mandait au même, de Gien, que M. le prince lui avait fait proposer un accommodement et qu’il lui avait fait réponse qu’il se soumettrait aveuglément aux ordres du roi. Il ordonnait à l’abbé Fouquet d’en prévenir le coadjuteur et Mme de Chevreuse, afin de leur prouver jusqu’à la fin qu’il voulait entretenir avec eux une correspondance sincère.

Afin de ne donner aucun soupçon au coadjuteur des instructions secrètes qu’il avait envoyées contre lui à l’ambassadeur de France à Rome, Mazarin s’efforçait de plus en plus de lui persuader qu’il avait toujours en lui une pleine et entière confiance. Dans l’espoir d’endormir cet esprit si alerte, il écrivait lettres sur lettres à son parent, M. de Pennacors : «… Rien n’est capable de me faire concevoir la moindre méfiance de la personne de M. le coadjuteur, lui mandait-il de Vierzon le 22 janvier, après les choses que la princesse palatine m’a mandées et celles que vous et M. l’abbé Fouquet m’avez dites de sa part. On a beau m’écrire, comme on fait continuellement, qu’il est accommodé avec M. de Chavigny, tantôt qu’il l’est avec M. de Beaufort, et qu’il a donné les mains à sa réconciliation avec M. le prince, et enfin qu’il est le principal instrument de tout ce que M. le duc d’Orléans fait contre moi, je vous proteste que je lis

  1. Archives des affaires étrangères ; France. Lettres de Mazarin, t. XXIX.