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chorégraphie humanitaire ne l’empêcha pas d’agir avec un singulier discernement lorsqu’il mit la prison et les détenus sous la garde de Vérig.

Il promena celui-ci dans la maison et, sous le prétexte de lui en « faire les honneurs, » il lui en montra toutes les dispositions. Après la première cour, l’on entre dans une sorte de vestibule qui est le second guichet ; à gauche s’ouvre le parloir, pièce assez étroite séparée en deux parties égales dans la longueur par un fort grillage en fer ; à droite, c’est le greffe et à côté l’ayant-greffe, c’est-à-dire la chambre où ton fait la toilette, la très inutile et très cruelle toilette des condamnés à mort. En face et dans l’axe du vestibule, une petite porte très solide, lamée de fer, permet de pénétrer dans la cour principale, large préau d’où se voit l’ensemble de la maison pénitentiaire proprement dite : au fond, la chapelle ; à droite, le bâtiment de l’ouest, composé d’un rez-de-chaussée où sont les ateliers et de trois étages renfermant chacun une section de cellules ; à gauche, le bâtiment de l’est avec une distribution absolument analogue ; toutes les fenêtres sont munies de barreaux. Dans l’angle de la cour, à droite, une porte, fortifiée par une grille que l’on ferme le soir, conduit à une assez vaste pièce qui est le guichet central ; des surveillans y sont en permanence jour et nuit. Lorsque l’on a traversé le guichet central, on entre dans une sorte de petit jardin où trois lilas et un marronnier apportent un peu de gaîté. C’est là un quartier isolé : en face, au rez-de-chaussée, la bibliothèque, au-dessus l’infirmerie, à droite, une galerie à arcades où sont situées les trois grandes cellules exclusivement réservées aux condamnés à mort.

Au bout de la galerie, une porte basse, la porte de secours, domine cinq marches par lesquelles on descend dans le premier chemin de ronde qui enveloppe toute la prison, et qui est lui-même enveloppé par un second ; des murs de 30 pieds de haut séparent les deux chemins l’un de l’autre et enferment toute la maison derrière un rempart construit en pierres meulières. Dans leur minutieuse visite, Vérig et François s’arrêtèrent au milieu du petit jardin de l’infirmerie, l’examinèrent avec soin et parurent hésiter ; ensuite ils inspectèrent les deux chemins de ronde et regardèrent longtemps le mur élevé entre le second et un grand terrain vague qui sépare la prison de la rue de la Folie-Regnault. C’était là une sorte de promenade extérieure. François et son ami Vérig revinrent au second guichet, traversèrent l’avant-greffe, s’engagèrent dans un large escalier qui les mena à la quatrième section, long couloir où vingt-trois cellules se font face de chaque côté, de façon que l’on peut y enfermer quarante-six détenus. François fit remarquer à Vérig tout au bout de ce corridor, en face de la vingt-troisième