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premier fit partie du département jusqu’à sa mort; le second y puisa les élémens de son Histoire de la diplomatie française, l’ouvrage classique sur la matière. Malheureusement le bureau n’a pu achever ses travaux : les analyses qu’il a laissées font regretter les nombreuses lacunes qui restent à combler. — Parmi les autres réformes relatives à l’organisation diplomatique et faites par le comité de salut public, nous citerons la création de l’agence du département à Marseille, qui a existé jusqu’en 1874, et qui rendait de grands services à une époque où la distance entre Paris et Marseille n’avait pas encore été accourcie par le chemin de fer. Il fut également décidé qu’on reviendrait au système de l’ancien régime pour les ambassades et légations françaises à l’étranger : on laissa subsister les mêmes postes qu’en 1789, avec des traitemens s’élevant à la moitié de ceux des envoyés de France avant la révolution et payables en or.

En même temps que le comité faisait preuve, dans l’arrangement des services, d’une véritable intelligence des nécessités diplomatiques, il prenait de sages mesures pour faciliter la reprise des relations officielles avec l’Europe. C’est ainsi qu’il fit lever les scellés apposés pendant la terreur sur les archives de plusieurs missions étrangères. Une autre raison plus sérieuse amenait les puissances à des dispositions plus conciliantes à l’égard de la France : pendant que les idées les plus saugrenues triomphaient à l’intérieur, pendant que le sang coulait à flots dans Paris, nos armées se couvraient de gloire aux frontières. Il fait bon détourner les yeux des horreurs dont la capitale était le théâtre pour admirer ces vaillantes armées de la Meuse, du Rhin, des Alpes, des Pyrénées qui refoulaient partout l’ennemi. L’Europe comprit qu’il fallait compter avec la France révolutionnaire; de son côté, la France victorieuse avait besoin de paix : l’abîme qui la séparait de l’Europe se comblait peu à peu.

A la chute de Robespierre, le corps diplomatique à Paris se composait de MM. Kounemann, chargé d’affaires du Danemark, Boccardi, agent de la république de Genève, Cibon, chargé d’affaires de Malte. Gouverneur Morris, ministre des États-Unis d’Amérique, était parti, et Monroë, son successeur, n’était pas encore arrivé. Monroë, le même qui devint président de l’Union et a laissé son nom à une doctrine politique célèbre, arriva à Paris environ quinze jours après le 6 thermidor. Il ne savait guère à qui présenter ses lettres de créance et écrivit au président de la convention. On décida qu’il serait reçu par la convention elle-même. Comme dans les républiques grecques, comme dans cette Sparte, que les conventionnels aimaient à imiter, le ministre américain fut introduit au milieu de l’assemblée; des discours furent échangés, et le président, après