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réponses des autres à qui il a écrit. » En même temps, Retz écrivait à l’ambassadeur de France, au grand-duc de Toscane et au bailli de Gondi, premier secrétaire d’état de ce prince et qui était quelque peu son parent. Il suppliait le grand-duc d’empêcher les Espagnols de seconder les mauvaises intentions des princes de Condé et de Conti pour troubler son affaire, et il adressait la même prière au bailli de Gondi, en lui mandant d’avoir toute confiance en l’abbé Charrier. Il calculait avec justesse et sagacité que les Espagnols, malgré leur liaison avec M. le prince, avaient tout intérêt à fortifier la position d’un chef de parti tel que lui, Paul de Gondi, et que, tout en faisant semblant d’entrer dans les vues de Condé, ils ne s’opposeraient nullement à la promotion. « Je n’ai encore aucune lumière, mandait-il à Charrier le 7 novembre, que les Espagnols soient dans la pensée de me nuire. Il y faut pourtant veiller, et l’on peut aisément (leur) faire voir... qu’il est de leur intérêt de voir dans une grande dignité un homme en France qui soit aussi opposé que moi à M. le prince, l’élévation de deux différentes puissances opposées ne leur pouvant être que très utile. Je crois M. le bailli de Gondi assez bien intentionné pour moi pour n’avoir pas besoin de nouvelles considérations pour m’obliger; il est pourtant bon, à mon sens, que, sans faire semblant d’affecter de lui faire savoir, vous fassiez une espèce de confidence à M. L’ambassadeur de Toscane du dessein que j’ai de faire épouser ma nièce au fils dudit bailli de Gondi pour continuer ma maison en France[1]. Je crois que ce moyen peut engager la cour de Toscane à faire tous les efforts à la cour de Rome et auprès des Espagnols, s’il est besoin. M. le nonce écrit par cette même voie fort favorablement pour moi et mande que je suis toujours inébranlable sur le sujet du Mazarin et que, comme on dit que cet homme a toujours quelque pensée de revenir, l’opposition la plus forte à son retour est ma promotion qui me met en un point d’être beaucoup plus considéré pour lui résister. Parlez, je vous supplie, dans les mêmes termes au pape, mais prenez garde de ne faire pourtant paraître le retour du Mazarin que comme une chose qui est dans ses intentions plutôt que dans la possibilité et sur lequel la reine forcera son inclination plutôt que de s’exposer aux troubles qui s’en ensuivraient. Vous avez su présentement que ledit Mazarin est venu à Huy, qui est auprès de Liège. Les partisans de M. le prince firent courre le bruit qu’il s’approchait de la frontière pour revenir en France. Cela a été bientôt dissipé par l’événement et parce qu’on a su qu’il ne s’était approché de Liège que pour être plus près de l’électeur, qui y est venu, et sans lequel il n’oserait demeurer auprès de Cologne, parce qu’il

  1. Le duc de Retz, frère aîné du coadjuteur, n’eut que deux filles.