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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 juillet 1877.

La crise singulière, malheureusement fort dangereuse, qui a éclaté il y a deux mois et qui doit se dénouer dans les élections prochaines, n’est point sans doute arrivée à la période la plus aiguë. L’heure où le scrutin s’ouvrira dans la France entière n’est même pas encore fixée. Déjà cependant on peut bien dire que la lutte est engagée de toutes parts et sous toutes les formes.

L’acte du 16 mai a été le brusque et retentissant préliminaire, les hostilités ont été officiellement déclarées par le décret de dissolution de la chambre, la guerre ne s’interrompra plus maintenant jusqu’au jour où le pays, invoqué comme arbitre, aura prononcé souverainement sur un des plus graves conflits de notre histoire parlementaire. Pour tout le monde, pour le gouvernement comme pour les partis, c’est désormais la grande et unique question. Le ministère, cela va sans dire, n’en est point à se préparer au combat ; il n’a pas d’autre préoccupation depuis sa naissance. Chacun de ses actes a une signification électorale, et M. le président de la république lui-même, en passant l’autre jour en revue au bois de Boulogne les troupes stationnées à Paris, a jugé nécessaire d’entretenir l’armée de sa politique. Le ministre de l’intérieur, M. de Fourtou, a fait sa circulaire d’apparat et probablement ses circulaires confidentielles ; il a donné ses instructions de guerre, et M. le ministre des travaux publics, lui aussi, a découvert dans l’arsenal de l’empire un vieux décret de 1852 attribuant au gouvernement le droit de réclamer la révocation des agens des chemins de fer qui seraient tentés d’être les complices des propagandes hostiles. Quant aux préfets et aux sous-préfets, à peine débarqués ils sont déjà en campagne ; ils passent la revue des colporteurs, ils interdisent la vente des journaux ou ils ferment les cercles. De toute façon, le ministère est visiblement décidé à tout épuiser, même à faire refleurir la candidature