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par un canal littoral, puisque les embouchures du Rhône sont décidément innavigables. Sur la Seine, les canaux et les rivières qui en dépendent, on exécutera des travaux de même ordre et l’on donnera à toutes les écluses la même largeur et la même longueur, à toutes les voies la même profondeur d’eau, de manière que, sans transbordement, sans rompre charge, le même navire puisse aller de Marseille à Paris par eau, voire à Rouen, au Havre, comme y va déjà le même wagon.

Les marchandises lourdes, encombrantes, de peu de prix, qui ne peuvent payer qu’un fret très modéré, que l’on n’attend pas à jour et à heure fixes, prendront le canal, où le fret est incomparablement moins élevé que sur la voie ferrée. Ces marchandises n’en sont pas moins précieuses pour le trafic et le transit national. En abordant nos ports, elles contribueront à donner à notre marine une partie du fret de sortie qui lui manque : ce sont les houilles, les pierres de taille, les ardoises, les moellons, les briques, les engrais, les bois, les vins, les huiles, le sel, les fers, les machines. Les autres denrées, moins volumineuses et plus chères, prendront la voie de fer. Le canal ne fera pas concurrence au rail, tout au contraire les deux voies s’aideront, se donneront un mutuel concours. Quand le tunnel sous-marin sera ouvert de Calais à Douvres, on ira sur le rail de Marseille jusqu’à Londres. Par toutes ces mesures, on assurera définitivement à la France le transit qu’elle retient encore, mais qu’elle perdrait inévitablement si une seule de ces mesures était différée.

Il est urgent de faire disparaître toutes les causes d’infériorité qui agissent contre nous ; tout cela enraie et suspend les affaires, On a retiré à temps l’impôt qu’on avait si mal à propos remis sur les matières premières et rétabli la liberté des pavillons, aboli les surtaxes sur les navires étrangers ; mais les droits de timbre, qu’on a si fort élevés sur les effets de commerce, il serait bon aussi de les diminuer. Et les droits sur les sucres, qui intéressent à un si haut degré notre agriculture indigène et coloniale, notre marine, notre industrie, notre commerce et principalement celui de Marseille, ne serait-il pas temps de les régler au mieux des convenances de tous ? Cette question des sucres, toujours pendante, est toujours plus embrouillée à mesure que les commissions et les enquêtes s’en occupent davantage. Il faut la résoudre enfin, soit au moyen d’un droit unique comme pour d’autres produits, soit au moyen de la richesse saccharine qui serait proportionnellement imposée. Tout ce qui gêne le commerce et l’industrie est vicieux et va contre l’effet qu’on en attend ; toutes les entraves fiscales sont mauvaises, et doivent être irrévocablement condamnées. Il est fâcheux que les chambres, dans la plupart des cas, en votant si promptement ces sortes d’impôts, n’obéissent qu’à une