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de la part d’un homme qui, pour la première fois, a pétri la glaise et manié l’ébauchoir. La Parque n’a pas la même valeur. L’anatomie des pieds et des mains y est accentuée comme en un modèle d’écorché. La physionomie douloureuse n’est pas dans le caractère traditionnel de la Parque. La composition, bien que peut-être un peu primitive (deux figures exactement l’une derrière l’autre) s’agence en lignes heureuses. Le défaut capital de ce groupe est de ne point tourner ; il semble que le dos de la Parque soit encastré dans un mur. On dirait plutôt une métope en demi-relief qu’une statue en ronde-bosse.

La statue de proportion presque colossale que M. Ludovic Durand a intitulée Libre représente un homme nu assis par terre, les jambes croisées, et tenant dans ses mains une chaîne brisée. La physionomie est peu animée, et nous doutons que cet homme pût être plus triste s’il symbolisait l’esclavage au lieu de la liberté. Cette figure est modelée avec une rare puissance ; M. Ludovic Durand est un dompteur de marbre. C’est la flamme qui manque à cette statue, d’une grande valeur d’exécution. Le plâtre d’une autre statue du même artiste, la Captive, est une femme nue qui se tient debout, les mains liées derrière le dos. La figure est bien posée, le modelé accuse la vie, et la tête a du charme. Le Mercure de M. Maximilien Bourgeois est d’un galbe élégant et d’une belle attitude, mais les formes sont peut-être un peu chétives pour le dieu de la palestre. L’Achille de M. Lafrance n’est pas un Grec. Cette courte figure et ce masque vulgaire sont d’un prétorien de Néron. Le Mime-dompteur, groupe de M. Schœnewerk, est une sculpture large et vigoureuse, d’un caractère bien français. Quelle puissance de vie en cet homme accroupi qui menace d’une mince baguette une panthère rampant à ses pieds ! On sent que l’homme est le maître de la bête. Le Charmeur de M. Bayard de la Vingtrie prend une pose qui a de l’élégance et qui aurait aussi du caractère, si l’abus qu’on en a fait ne l’avait rendue banale. Le Faune de M. H. Moreau a de rares qualités de modelé et de mouvement. L’Icare essayant ses ailes, de M. Mabille, est d’une exécution moins savante et moins poussée, mais il y a une vraie originalité dans cette svelte figure, qui s’enlève avec une singulière légèreté. L’Hylas, de M. Morice, dont le plâtre a été si justement médaillé au Salon de 1875, a subi avec succès l’épreuve du bronze.

M. Félix Richard expose le modèle d’une Baigneuse, qui mérite le marbre. A demi assise sur un rocher, la jolie baigneuse regarde, avant d’entrer dans l’eau où déjà trempe son pied, si quelque Actéon, moins mythologique que celui de Diane, ne vient pas surprendre le secret de sa nudité. La pose est pleine de naturel et de