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science encore bien récente s’accrût d’une multitude de faits nouveaux et que l’étude embrassât un grand nombre de pays. Après la Suisse, la Savoie et l’Italie fournirent les premiers contingens. M. le professeur Desor sonda dès l’année suivante les eaux du lac de Neufchâtel, et peu après, en 1860, M. Morlot ayant fait connaître en Suisse les travaux exécutés en Danemark et en Suède, un grand mouvement fut imprimé à ce genre de recherches dans les pays du midi. MM. Gastaldi et Desor visitèrent cette même année les lacs de la Lombardie et trouvèrent dans les tourbières du Lac-Majeur des objets semblables à ceux des lacs de la Suisse. Dans le lac de Varèse, en 1863, MM. de Mortillet, Desor et Stopani reconnurent la période de transition de l’âge de la pierre à celui du bronze. Les palafittes du lac de Garde n’ont été aperçues que dans ces dernières années autour de la forteresse de Peschiera.

Mais dès 1862 MM. Strobel et Pigorini signalèrent, non loin de Parme, des dépôts d’engrais exploités par les cultivateurs sous le nom de terramares et y constatèrent la présence d’anciennes habitations lacustres ; en effet, les pilotis existaient encore, entourés de matières organiques et de restes nombreux d’industrie humaine ; la nature de l’alluvion démontrait que l’eau avait séjourné dans ces parties basses de l’Emilie, maintenant desséchées, et l’on ne pouvait douter que là s’était jadis développée une civilisation identique à celle des lacustres de la Suisse. Nous ne pouvons citer ici les noms de tous ceux qui, à partir de 1860, ont contribué à l’avancement des études préhistoriques ; leur nombre a été croissant à mesure que l’intérêt de ces recherches a été mieux compris et que la méthode à suivre a été mieux connue. Disons seulement que les fouilles se sont rapidement étendues à toute l’Europe et que le désir de contribuer au progrès de la science de l’homme a suscité de savans explorateurs dans toutes les contrées de l’Occident : en Autriche, Ramsauer et de Sacken ; en Hongrie, Romer ; Wild en Irlande ; Aspelin et Bogdanof en Russie ; en Angleterre, Evans, Franks, J. Lubbock. En France, j’ai déjà cité M. de Mortillet, qui vint un des premiers ; à ce nom nous devons ajouter ceux de MM. A. Bertrand, Costa de Beauregard, Cazalis de Fondouce, l’abbé. Bourgeois, et de M. Chantre, à qui nous empruntons la plupart de nos informations.

En 1862, Napoléon III fonda le musée de Saint-Germain. Cette collection devait réunir les antiquités gallo-romaines, pour lesquelles des recherches sur César avaient donné à l’empereur une prédilection particulière ; mais le directeur ne tarda pas à agrandir l’idée, obtint des secours plus larges et put bientôt offrir au public un musée préhistorique comparable à celui de Copenhague. Il est à regretter qu’une collection de ce genre soit reléguée à 20 kilomètres