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résidassent, ne pouvaient le livrer qu’en échange d’objets de même valeur, mais d’un usage différent. Ces objets d’échange devaient souvent faire défaut ; il fallut qu’on les découvrît ou qu’on se les procurât en assez grand nombre pour créer une sorte de commerce. Par le fait, ces échanges se produisirent, car les découvertes dont nous parlerons tout à l’heure ont démontré que la quantité de bronze a été en augmentant, que l’on a fait avec ce métal beaucoup d’instrumens qui jusque-là s’étaient faits de pierre, que l’on en a inventé de nouveaux, et qu’un moment est venu où la substitution du bronze à la pierre a été, pour ainsi dire, complète.

L’âge du bronze se confond dans ses commencemens avec la période de la pierre polie. Il y a donc une période de transition où les deux matières se font, pour ainsi dire, concurrence l’une à l’autre, et qui peut au même titre être comprise dans l’âge de la pierre ou dans celui du bronze. On se tromperait néanmoins si l’on croyait que le métal fit entièrement disparaître la pierre dure lorsque celle-ci eut été définitivement vaincue. Elle continua d’être employée à certains usages, et elle s’utilise encore dans plusieurs pays d’où ni le bronze, ni même le fer n’ont encore pu la faire disparaître. Ainsi ces petites lames allongées d’obsidienne ou de silex à double tranchant, auxquelles on a donné le nom de couteaux, servent encore dans la péninsule hellénique, en Asie-Mineure, en Palestine et ailleurs sans doute, à garnir des pièces de bois que le paysan traîne sur l’aire pour battre le blé et hacher la paille. Ils ont la même forme que dans l’âge du bronze, et ils sont fabriqués par les mêmes procédés ; mais la prédominance du métal sur la pierre et l’abandon de celle-ci dans la plupart des cas où elle était employée caractérisent la longue période qui suivit celle de transition et qui constitue l’âge du bronze proprement dit.

De même que ce métal s’était substitué à la pierre, il arriva qu’un métal nouveau vint faire concurrence au bronze et tendit à le remplacer dans tous les cas où il avait sur lui des avantages évidens. Des découvertes qui remontent à une vingtaine d’années seulement, et qui depuis lors se sont répétées dans presque toute l’Europe, ont fait connaître la période de transition du bronze au fer. Elle diffère de celle qu’on a nommée le premier âge du fer et qui était signalée depuis longtemps. Durant celle-ci, le fer est déjà maître de la place et n’a plus qu’à se perfectionner lui-même. La période transitoire est marquée par la substitution lente et progressive du nouveau métal à l’ancien, et par une influence réciproque de l’un sur l’autre. Quand le fer apparut en Europe, il eut la même destinée qu’avait eue le bronze plusieurs siècles auparavant. Il fut une matière, rare et précieuse ; il ne perdit de sa valeur que par son abondance croissante, et quand il put fournir les outils, les