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LES MÉMOIRES
D’UN
HUMANISTE AMÉRICAIN

GEORGE TICKNOR.
Life, Letters and Journals of George Ticknor, 2 vol. London 1876.
II.
L’EUROPE DE 1835 A 1838[1].


I.

A Londres, en janvier 1819, Ticknor ne connaissait pas de société plus agréable que celle de Holland-House. Lord Rolland, bon humaniste lui-même, savait causer avec agrément. On voyait dans son salon sir James Mackintosh, logique en toutes choses, brillant surtout dans les réunions sérieuses, — Sidney Smith, qui savait se plier à tous les entretiens et charmer tous ses interlocuteurs, — Brougham, peu séduisant par l’extérieur, banal à l’ordinaire, se transformant dès que le sujet discuté en valait la peine; ce grand orateur, — qui l’eût cru ! — aimait mieux causer avec deux ou trois amis dans un coin que se livrer à une conversation générale; — puis lord John Russell, lord Auckland, en un mot tout ce que le parti libéral avait d’hommes intelligens. Jeffrey était là aussi, plus réservé, moins bruyant qu’il ne s’était montré en Amérique. Toutefois notre Américain avait rencontré un écueil dans ce monde élégant et distingué : il avait déplu à lady Holland. Celle-ci lui demanda un jour, par étourderie, si la Nouvelle-Angleterre n’avait pas été peuplée

  1. Voyez la Revue du 15 avril.