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le soin de chercher une compensation en Égypte et même dans l’ile de Candie. L’Angleterre s’était montrée disposée à accepter cette convention, qui paraissait d’une exécution d’autant plus facile que la Russie avait toute raison de croire que l’Autriche ne s’y opposerait pas… lorsque le gouvernement de la France intervint. » Ainsi, à part les amphibologies de langage, tout s’explique : l’empereur Nicolas propose le démembrement de l’empire ottoman, l’Angleterre est prête à accepter, sur ce paraît « l’homme de décembre, » etc. Et voilà comment on écrit l’histoire ! M. Antonin Proust n’a qu’à consulter son collègue M. le comte de Saint-Vallier, qui pourra l’éclairer. Nos jeunes attachés subiront les examens qu’on leur imposera, soit : ils ne reculeront pas devant les épreuves orales ou écrites ; mais qui examinera ceux qui ont l’ambition si bien justifiée de travailler à la réorganisation des services diplomatiques et qui se sont si studieusement préparés à cette mission ?

ch. de mazade.




REVUE DRAMATIQUE.
THÉÂTRE DE L’ODÉON. — L’Hetman, drame en cinq actes et en vers, de M. Paul Déroulède.

Le drame que iM. Paul Déroulède a fait représenter récemment à l’Odéon se rapporte d’une manière très étroite par l’inspiration fondamentale à ses précédentes publications, et nous sommes heureux qu’il nous soit une occasion toute naturelle d’ajouter notre part de louanges au concert flatteur qui a déjà salué les Chants du soldat. Depuis la date sinistre qui a commencé pour notre pays une situation si pénible, il n’y a pas eu d’œuvres mieux faites pour bien mériter de l’opinion que les deux petits volumes de chants lyriques où le jeune poète a mis toutes ses ardeurs de néophyte guerrier et toutes les vivacités de ses haines patriotiques. La place qu’il s’est acquise aurait dû, ce semble, lui être vivement disputée ; il n’en a rien été cependant, et M. Déroulède reste jusqu’à présent l’unique chantre du patriotisme que nos revers aient eu le privilège d’inspirer.

Si jamais désastre national sembla fait pour tirer du fond des cœurs et des âmes les plus fortes expressions de la douleur et de l’amertume, c’était bien celui que nous avons subi il y a six ans ; qui donc alors nous expliquera cette disette poétique ? Est-ce que les talens auraient disparu de ce pays qui en fut toujours si prodigue ? Non, notre littérature n’a pas cessé d’être fertile, et il est même remarquable qu’elle a produit depuis nos revers plus d’œuvres de mérite qu’elle n’en produisait sous la dernière période dans un égal nombre d’années ;