billets leurs amis et leurs connaissances à venir les entendre, lisaient leurs ouvrages. Voilà bien le siège élevé où l’orateur prenait place, « couvert, dit Perse, de sa toge neuve, portant à ses doigts des bagues brillantes, après avoir salué l’assistance avec un œil caressant.» Au pied de la tribune, sur ce pavé de marbre, on plaçait des sièges commodes, qui étaient occupés par les personnages importans qu’on voulait flatter, et qu’on tenait à mettre à leur aise pour qu’ils fussent disposés à mieux admirer. Sur les gradins de l’hémi-cycle s’entassaient les gens du commun, les amis obscurs, les cliens, les obligés, tous ceux qu’on invitait pour faire nombre et pour applaudir. C’était la partie bruyante de l’auditoire : les grands seigneurs de l’orchestre faisaient à peine entendre un léger murmure quand ils étaient satisfaits; les amis des derniers rangs devaient crier et trépigner pour témoigner leur admiration. Quand on sait à quoi cette salle était destinée, on en comprend mieux les dispositions. Elle est à moitié souterraine pour être plus fraîche ; les lectures publiques avaient souvent lieu pendant les vacances du sénat et des tribunaux, au mois d’août (augusto récitantes mense poetas), et l’on sait ce qu’est le mois d’août à Rome! Pour que les deux ou trois cents auditeurs que la salle contenait fussent moins mal à l’aise au milieu du jour, on l’avait ainsi enfoncée sous la terre; mais, comme on voulait en même temps leur faire oublier qu’ils étaient dans une cave, on y avait prodigué toute sorte de décorations riantes. C’est dans ce dessein surtout qu’on avait ménagé ces sortes de niches en forme de fenêtres dans lesquelles étaient peintes de fausses perspectives pour tromper les yeux. Avec un peu de complaisance et ce demi-sommeil où nous plonge une lecture grave un jour de grande chaleur, les auditeurs pouvaient se faire illusion à eux-mêmes et croire qu’ils voyaient encore à travers la fenêtre ouverte les beaux jardins qu’ils venaient de traverser. Rien n’était donc néglige pour bien disposer l’auditoire : déjà l’amitié le rendait indulgent, le bien-être devait le conduire aisément à l’enthousiasme. Supposez, dans cette salle charmante, où tout était fait pour le plaisir des yeux, devant un public favorable, un lecteur habile qui lit un ouvrage médiocre dans l’ensemble et mal composé, mais plein de détails piquans, d’où se détachent sans cesse des pensées ingénieuses, des expressions brillantes, avec des allusions voilées aux événemens du jour, et une pointe de hardiesse contre le prince ou ses ministres, et vous comprendrez qu’à tout moment la salle éclate en applaudissemens. C’est ce qui a fait qu’on s’est trompé si souvent à cette époque sur le mérite véritable des ouvrages, et qu’on a salué comme des merveilles destinées à durer toujours des œuvres agréables et frivoles dont le succès ne devait pas survivre à la génération qui les avait applaudies. Cette salle de lecture, si heureusement
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