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surtout à produire du bois réclament de tout autres soins.

Dans les montagnes des Maures et de l’Esterel, si souvent dévastées par l’incendie qu’on les a désignées sous le nom de région du feu, le pin maritime est le précurseur du chêne-liège. Celui-ci formant l’essence précieuse à tous égards, le traitement du pin doit surtout avoir en vue le chêne. Éclaircir fortement les pins pour que les lièges se produisent en dessous d’eux, enlever en jardinant tous ceux qui dominent des chênes, débroussailler le sol de manière à prévenir les ravages du feu et substituer ainsi graduellement le liège au pin maritime, tels sont les soins principaux qu’exigent ces forêts, riches d’avenir. On voit combien d’une contrée à l’autre, dans notre France, le traitement des pins diffère par le but et les moyens.

La culture du mélèze est très simple. Les semis naturels de cette essence, irréguliers, souvent clair-semés, se trouvent sur certains points très serrés. Ce dernier état est dangereux; la neige, au lieu de couler à terre entre les tiges, peut alors s’accumuler sur le jeune massif et par son poids l’écraser tout d’une pièce. Il convient donc de desserrer de bonne heure les jeunes mélèzes et de les maintenir toujours en massif un peu clair. Dès l’âge de quarante ans, les perchis recouvrent une prairie productive, les jeunes arbres sont alors assez forts pour se défendre contre les bestiaux; le moment est venu de rendre à ceux-ci un terrain qui donnera tout à la fois de l’herbe et du bois. Le bois communal de Puy-Saint-Pierre, futaie de mélèze pur faisant partie des vertes forêts qui dominent la rive droite de la Guisanne jusqu’aux approches du col du Lautaret, nourrit pendant l’été les deux cents vaches du village, une par hectare. C’est pour la commune une ressource des plus précieuses et aussi indispensable que le bois. La forêt, qui conserve le sol, et le pâturage, qui permet d’en obtenir des produits immédiats, sont là en corrélation nécessaire; le traitement en est facile quand le mélèze est seul et qu’il forme un massif continu.

Il n’en est pas toujours ainsi. Au milieu des âpres rochers du Briançonnais, entre la Durance et le Pelvoux, s’élève un contre-fort séparant les deux vallées secondaires de Largentière et de Vallouise. C’est une des plus intéressantes régions des Alpes; mais, pour la découvrir, il faut monter au plateau d’Oréal, qui en occupe le milieu à l’altitude de 2,000 mètres. Ce plateau, d’une centaine d’hectares, isolé par les deux vallées latérales, forme le centre d’un cirque elliptique de 20 kilomètres de longueur, fermé par des crêtes à 3,000 mètres. En montant des Vigneaux à Oréal on traverse, au pied d’un escarpement gigantesque, des perchis de pins, mélèze et sapin, qui forment un excellent mélange. Au col de la Posierle on voit un perchis de mélèze qui a souffert de l’état serré