chênes et de bouleaux; l’écorce blanche de ces derniers tranche vivement sur les fûts rouges des pins et les troncs bruns des chênes. Dans ces forêts, les animaux sont rares et silencieux; le chevreuil, le pic et la gelinotte, qu’on rencontre de loin en loin, font encore ressortir la solitude profonde. En montagne, le pin sylvestre s’allie parfois au hêtre ou au sapin. Ceux-ci, par leur couvert épais, maintiennent dans le sol la fraîcheur et la vie; le pin s’élance au-dessus d’eux; grâce à son maigre feuillage, il les domine sans leur nuire et forme ainsi des arbres d’un fut magnifique.
C’est toujours en pleine lumière que cet arbre se développe. Dans le nord, les nuits étant très courtes en été, il est éclairé presque sans discontinuité pendant la saison de la végétation. Dans les plaines du Volga, où il ne pleut guère, l’air sec et pur laisse arriver au sol une vive lumière. Sur nos montagnes, ce sont les versans exposés au sud et à l’ouest qu’habite ce pin, en face des hêtres, des sapins, des mélèzes, qui, suivant la région, couvrent les versans opposés. De toutes nos essences, c’est d’ailleurs celle qui résiste le mieux au vent, pourvu qu’il ne soit pas constant, et au froid, pourvu que l’air ne soit pas humide.
Par la forme, le pin sylvestre est une espèce extrêmement variable. Néanmoins il s’élève toujours en arbre et ne dégénère jamais en buisson, comme il arrive au hêtre, à l’épicéa, au bouleau et au pin de montagne. Même en Laponie, dans le bassin de la Tana, rivière la plus septentrionale de l’Europe, au-delà du 70e parallèle, il forme encore des arbres propres à la construction des maisons ; mais, à cela près, il prend les formes les plus différentes, depuis l’arbre court, flexueux, branchu, à cime écrasée, si fréquent dans les Alpes, jusqu’au pin de mâture, élancé, droit, soutenu, et terminé par une flèche aiguë ne portant que des rameaux grêles et courts. Ce dernier, toujours exceptionnel, même dans les forêts aptes à le produire, ne se voit plus guère en arbres mûrs, âgés de trois siècles, capables de donner des mâts de premier ordre. C’est un type qui tend à disparaître de l’Europe, où il formait un des beaux tableaux de la nature végétale[1] ; mais on peut voir encore quelques beaux jeunes pins de cette forme en haut de la vallée de la Vésubie, sur le territoire de Saint-Martin Lantosque, au-dessous du cirque de la Madonna di Finestre.
Les meilleures forêts de pin sylvestre que possédait la France sont restées en Alsace-Lorraine. Le plateau central n’en a plus que des lambeaux, comme on en voit dans les gorges de l’Allier, et cependant
- ↑ Le canton de Pustelnik, du domaine de Lopatyn, entre Zolkiew et Brody (Galicie), est, dit-on, la plus belle pineraie de l’Europe. Sur de grandes surfaces, il porte à l’hectare une centaine de pins sylvestres de 0m,80 à 0m,50 de diamètre et de 45 à 50 mètres de hauteur.