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l’air, chasse les miasmes et permet les cultures des pays chauds en même temps que celles des pays tempérés. On y obtient les céréales de l’Europe aussi bien que la canne à sucre, le dourah, les mils et le riz; les épices de toute sorte, les huiles, les résines, le café, le coton, les plantes tinctoriales comme la garance et l’indigo, les plantes médicinales les plus variées, les bois de construction les meilleurs, les fruits les plus divers : les ananas, les figues, les dattes, les oranges et même la vigne. Parmi les minéraux, on trouve l’or, le fer, et, ce qui est plus important, le charbon, qui affleure en couches puissantes en divers endroits. Le climat est semblable à celui des sanitariums de l’Himalaya. Il paraît moins énervant que celui de l’intérieur de Java : la latitude est la même; mais le plateau africain est plus élevé et par conséquent moins chaud; or dans la région des plantations de café de Java, situées sur les collines, les Hollandais vivent et se multiplient, sans que la mortalité soit sensiblement supérieure à celle de l’Europe. Les explorateurs de l’Afrique qui y ont succombé à la maladie ont été emportés par les fièvres des régions basses de la côte et des marais de l’intérieur. Ceux qui ont parcouru le plateau des lacs comme Livingstone, Speke et Grant, Baker, Stanley, Cameron, Gessi, n’y ont pas contracté de maladies mortelles, quoiqu’ils aient été soumis à des privations et à des intempéries qui, sous notre climat, auraient ruiné les constitutions les plus robustes; couchant en plein air sur le sol détrempé, passant des semaines entières sans pouvoir se sécher, ni se reposer tranquillement, nourris irrégulièrement et souvent d’une façon insuffisante ou malsaine. Supposez des blancs établis à l’altitude de 800 mètres ou de 1,000 mètres dans de bonnes habitations et pourvus de tout ce qui est nécessaire, et certainement ils vivront beaucoup mieux qu’à Calcutta, à Bombay, à Singapore ou à Batavia, et même qu’à l’île Bourbon ou aux Antilles.

Un instant de réflexion suffit pour faire comprendre le magnifique avenir des colonies qui ne tarderont pas à s’établir dans l’Afrique centrale. D’où est venue la richesse des états du sud de l’Union américaine, de Cuba, de Saint-Domingue et du Brésil? On l’a créée en mettant en valeur la merveilleuse fertilité d’une terre fécondée par les rayons du soleil équinoxial, au moyen des bras d’une race adaptée à ce climat brûlant. Il y avait là cependant deux côtés très fâcheux : les bras étaient ceux d’esclaves qui ne travaillaient que par contrainte et par conséquent mal, et ces esclaves, il fallait les acheter très cher; c’était donc un capital sur lequel on devait compter l’intérêt et l’amortissement. Transportons les mêmes entreprises, cultures du sucre, du coton, du café ou du tabac, dans l’intérieur de l’Afrique, combien les conditions sont plus favorables ! La terre