classe à part sous le nom de « momies à la poix. » On montrait à Anvers, moyennant argent, la momie d’un ancien roi d’Egypte avec sceptre et couronne. Le surintendant Fouquet, soit qu’il y ait été attrapé lui-même, soit qu’il cédât à la mode, devait aussi placer dans sa maison de Saint-Mandé deux momies avec leurs boîtes, qu’on lui avait vendues comme étant celles de Chéops et de Chéphrem. On montrait jusque dans une sacristie une reine égyptienne portant des bracelets ainsi que d’autres ornemens, à laquelle on avait pris soin de façonner un nez avec du bitume.
Le XVIe siècle a laissé d’incomparables monumens funéraires qui ne sont pas pourtant à l’abri de ce genre de critique. On loue avec raison le mausolée de Louis XII et de la reine Anne, construction vraiment monumentale. L’auteur pourtant, — Paul Ponce ou bien plus probablement Jean Juste, — n’a pas évité cette sorte de réalisme que marquent la gorge affaissée de la reine, la bouche ouverte du roi, ses traits décomposés, le ventre recousu de l’un et de l’autre après l’opération de l’embaumement. Une beauté plus pure reluit dans le mausolée de François Ier, qui répondait bien au faste de la monarchie des Valois. Si, dans l’intérieur du monument, les corps du roi et de la reine sont représentés nus, la nudité et la mort ont ici un auguste caractère, et on admire la belle expression du visage. Que dire aussi du mausolée d’Henri II, dont les dessins ont pu être attribués à Philibert de Lorme et l’exécution à Germain Pilon, qui frappe par l’heureux mélange du marbre et du bronze, la précision dans les contours, la naïveté dans les mouvemens, le facile et large développement dans les draperies, enfin par la noble expression de ces figures, conservant encore comme un reste de vie ; et du mausolée de François II, belle imitation de l’antique, avec ses colonnes, dont l’une, chargée de flammes, est surmontée d’un vase de bronze dans lequel était le cœur du roi? N’est-ce pas un monument presque royal que celui du connétable Anne de Montmorency ? C’est l’amour conjugal le plus exalté qui inspirait à Madeleine de Savoie de le commander à l’architecte-sculpteur Jean Bullant. En admirant ce monument d’architecture, couvert d’un demi-cintre et orné de colonnes torses décorées de feuilles de vigne et de lauriers, il faut reconnaître que l’esprit de gloire mondaine y a plus de part que la religion. La statue du connétable reproduit ses distinctions militaires : il porte une armure complète avec les cordons de ses ordres; la connétable est, elle aussi, vêtue du costume qui annonce son rang. En fait de somptuosité, que ne doit-on pas attendre des contemporains du Rosso, du Primatice, de Benvenuto Cellini? Nous indiquons seulement les grandes œuvres italiennes. Il est éternellement regrettable que Michel-Ange n’ait pas terminé le monument de Jules II, qui eût été, par sa vaste étendue et ses innombrables