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est faite et aussi à cette concurrence de l’industrie dont parlait M. Thiers ; mais en même temps fait-on tout ce qu’il faudrait pour les encourager, pour les soutenir dans leur rude carrière ? Est-on bien sûr d’employer les meilleurs moyens pour raviver, pour entretenir dans la jeunesse française qui se presse sous les drapeaux cet esprit militaire dont l’affaiblissement trop visible est un des symptômes les plus dignes de toutes les sollicitudes patriotiques ? Si le volontariat d’un an n’a pas répondu entièrement aux espérances qu’on avait conçues, s’il prête à tant de critiques, ce n’est pas absolument la faute d’une disposition législative, c’est tout simplement parce que l’application a été mal comprise, mal dirigée et poursuivie de la manière la plus décousue, quelquefois avec un mauvais vouloir à peine déguisé. Le mal est là, dans l’esprit, dans la direction de tous les jours. Il peut dépendre du gouvernement, des chefs militaires, de créer par leur impulsion, par leur incessante activité, une vie nouvelle dans l’armée, et, pour le moment, à coup sûr, ce n’est pas en substituant le service de trois ans au service de cinq ans qu’on hâtera ce rajeunissement, cette grande réforme morale autant que militaire. Ébranler par un vote irréfléchi, par un caprice radical, une loi à peine éprouvée, ce serait tout bonnement troubler une expérience, ajouter un désordre à une situation déjà assez compliquée et donner un exemple de plus de cette impatience agitatrice que la chambre des députés porte malheureusement dans toutes les sphères politiques ou administratives.

Que se propose-t-on, à quoi espère-t-on arriver en appliquant à tout cette activité fébrile ? voilà la question de l’armée livrée de nouveau à tous les débats et à toutes les polémiques ! Aujourd’hui c’est sur les chemins de fer, à propos d’une convention négociée entre M. le ministre des travaux publics et la compagnie d’Orléans, qu’on discute à perte de vue, reproduisant toutes les théories de rachat par l’état, toutes les récriminations contre le monopole des grandes compagnies, et tout cela, bien entendu, pour n’arriver à aucune conclusion précise. Il y a une commission occupée à revoir les lois sur les réunions publiques, et certainement elle est en train d’enfanter des réformes qui paraissent devoir être d’un ordre capital. Autrefois les réunions devaient être tenues dans un lieu clos et couvert ; aujourd’hui le lieu devra être clos, mais il n’aura pas besoin d’être couvert ! Par le passé, un représentant de la police devait assister aux réunions avec un caractère officiel ; aujourd’hui, il pourra toujours assister aux réunions, mais il ne sera pas tenu d’avoir ses insignes ! On voit bien par là évidemment la pressante nécessité de la révision des lois sur les réunions publiques ! Le plus curieux est ce qui se passe dans la commission chargée d’entreprendre le code de la presse. Comment se terminera ce grand travail ? La malheureuse commission semble manifestement se perdre dans un dédale de