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partage de diverses races sauvages, dont nous aurons à parler. Ce qu’on sait de leur faune est sans doute incomplet, cependant on peut affirmer qu’il n’y existe aucune bête féroce. Toutes abondent en sangliers, en cerfs, en axis au pelage étoilé, en chevreuils et en buffles, auxquels les indigènes insoumis font une guerre incessante, car c’est de la chair de ces animaux et de racines que se nourrissent ces montagnards. Dans les montagnes de Nueva-Ecija, on trouve le cochon d’Inde que les Négritos apprécient beaucoup, le coq de montagne, des tourterelles d’une variété infinie, dont la plus remarquable est celle appelée « tourterelle poignard, » et l’aigle. Les forêts qui couvrent les cordillères ne peuvent être contemplées que de loin, entourées de leurs nuages bleuâtres, malgré la présence à Manille d’un inspecteur des montagnes, chargé d’inspecter des hauteurs qui ne sont pas abordables. Les essences qui dominent dans ces forêts sont pourtant connues : c’est le cèdre, autour duquel la liane aime à s’enrouler pour retomber jusqu’à terre en guirlandes fleuries, le bambou aux rejets puissans, aux tiges délicates, le jonc, qui malgré sa flexibilité rendra l’accès des fourrés longtemps impossible en raison de son exubérante reproduction.

C’est à la disposition de ces montagnes que les Philippines sont redevables d’être soumises à deux saisons bien tranchées, l’une de pluie, l’autre de beau temps, sans pour cela que la température éprouve de grandes variations. Lorsque la mousson ou série de vents qui soufflent du sud-ouest commence à s’établir, la pluie tombe dans les régions qui sont au sud et à l’ouest des hauteurs. Pour les contrées du nord, le mauvais temps n’arrive que lorsque règne la mousson du nord-est. La saison sèche commence à Manille vers la moitié de novembre et dure jusqu’en juin. Pendant les autres mois de l’année, des nuages obscurcissent le ciel, et déversent tous les jours sur la terre de grandes cataractes d’eau. Les orages sont fréquens en juin et en juillet. La foudre tombe alors journellement et fait beaucoup de victimes. L’observatoire météorologique de l’Athénée municipal de Manille a donné en 1867 les observations suivantes : température moyenne, 27° 9 ; la plus haute température a été de 37° 7, le 15 avril à trois heures de l’après-midi ; la plus basse, le 30 janvier à six heures du matin, de 19° 4. L’évaporation journalière fut pendant cette année-là d’environ 6mm, 3, et le pluviomètre, pour les douze mois, atteignit la hauteur de 3m,072, En septembre, il tomba 1m,5 d’eau, presque autant qu’il en tombe à Londres pendant une année. Les changemens de mousson produisent dans ces parages les terribles ouragans auxquels on a donné le nom chinois de typhons, sans doute parce qu’annuellement ils ravagent les côtes du Céleste-Empire.