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tombes monumentales, ont été décrites par M. Mariette dans son ouvrage sur les Tombes de l’ancien empire, et ont pu être vérifiées par les nombreux voyageurs qui sont allés récemment visiter l’Égypte, comme si cette vieille terre, qui semblait appartenir qu’aux initiés de la science, de même qu’elle réservait autrefois ses mystères aux seuls initiés e’ la religion, n’avait plus désormais rien à cacher à personne.

On est saisi de la pensée religieuse qui inspire ces monumens dès l’entrée de la chapelle extérieure, où on trouve inscrites sur une des portes une prière et l’indication des jours consacrés au culte des ancêtres. Cette table en albâtre, destinée aux offrandes, indique elle-même cette croyance dans un moi permanent, attestée aussi par les prières et les parfums qu’on adresse aux défunts jusque dans la chambre sépulcrale par des orifices pratiqués à cette intention. Dans les tombes des rois de Thèbes de la vallée de Biban-el-Molouk, exploitées au nombre de vingt-cinq, si l’on y joint celles de quelques hauts fonctionnaires, les idées religieuses, les représentations de la vie présente et de la vie ultérieure se montrent avec une diversité d’aspects très caractéristique. tantôt vous êtes comme accablé par les terreurs de la religion égyptienne : elles vous étreignent dans la tombe de Seti, père de Sésostris, où vous attendent d’effroyables figures de condamnés, de décapités, d’hommes précipités dans les flammes, de serpens qui rampent ou se redressent. Voilà donc l’idée que tant de générations se sont faite du kerneter (purgatoire) ! C’est l’enfer moins l’éternité, car il ne paraît pas que cette croyance d’un enfer éternel ait été admise par les Égyptiens, qui attribuaient à ces expiations redoutables une efficacité purifiante. Des images plus riantes s’offrent dans la tombe de Rhamsès III, où, dans une série de petites chambres, recouvertes de peintures murales pleines de naïveté et de charme, de fraîcheur encore, se retrouvent les épisodes de la vie brillante des pharaons et les objets de mobilier royal. On la désigne elle-même par le nom de ces harpistes si artistement dessinés, tenant en main des harpes richement ornées, d’une forme exquise, toutes prêtes, à ce qu’il semble, à vibrer sous les doigts qui les pressent. La vie respire de même dans ces barques aux mille couleurs, dans ces rouges cratères où le vin semble transparent, dans cet appareil de cuisiniers, de pâtissiers, de sommeliers, tous en activité, dans ces représentations champêtres d’une simplicité gracieuse, dans les détails les plus familiers, par exemple dans cette basse-cour peuplée d’oies, de canards, de poulets, ornement pacifique de la demeure d’un prince guerrier. Enfin, comme représentation des images fortement contrastées de la vie de souffrances et de l’existence bienheureuse dans l’autre monde, que trouverait-on de mieux que la tombe de