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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




28 février 1877.

Qu’en sera-t-il de toutes les histoires qui courent le monde soir et matin, de tous ces bruits qui se succèdent comme pour occuper les esprits impatiens dans cette phase nouvelle des affaires d’Orient ? Un jour c’est la Russie qui va passer le Pruth sans plus tarder, ou qui se dispose à envahir l’empire ottoman par la frontière d’Asie : on compte les corps d’armée, les bataillons, les sotnias de cosaques et les canons ; on connaît les plans de campagne, on sait le moment où l’exécution commencera. Un autre jour c’est la Porte qui doit envoyer un ultimatum à la Russie pour lui demander de désarmer. Tantôt la rupture va être poussée jusqu’au bout ; tantôt les ambassadeurs vont revenir à Constantinople, tout est sur le point de s’arranger au moyen de quelque combinaison proposée par l’Angleterre, à moins qu’une maladie du sultan Abd-ul-Hamid et une révolution nouvelle en Turquie n’embrouillent encore cet inextricable écheveau oriental. Ainsi en quelques heures, au gré du télégraphe, ce grand agitateur du monde, on passe de la guerre à la paix ou de la paix à la guerre, et en définitive ce n’est ni la guerre ni la paix ; c’est l’attente dans une situation où rien ne peut se décider si vite et où les imaginations inventives suppléent à la réalité.

Tout ce qu’il y a de vrai et de précis se réduit à quelques faits. D’un côté, la négociation directe engagée par la Turquie avec la Serbie et le Monténégro semble toucher à un dénoûment favorable, et si même au prix d’une prolongation d’armistice cette négociation réussit en effet, c’est déjà un commencement de solution, un premier gage d’apaisement. D’un autre côté, il y a toujours sans doute la difficulté la plus redoutable, celle des réformes, des garanties, qui Ont été l’objet des récentes délibérations de l’Europe à Constantinople, qui résument dans sa gravité le problème oriental. Ce que la Russie en pense, elle l’a dit, elle