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LES MEMOIRES
DU
PRINCE DE HARDENBERG

I.
AVANT IENA

Les quatre beaux volumes qui viennent de paraître à Leipzig sous le titre de Mémoires du chancelier d’état prince de Hardenberg[1] ; et dont la publication est célébrée par la presse allemande comme un événement littéraire, contiennent à la fois beaucoup plus et beaucoup moins que la plupart des ouvrages appartenant au genre des mémoires. On se flatterait vainement d’y trouver l’autobiographie détaillée et complète de l’homme d’état qui, né en 1750 dans l’électorat de Hanovre, entra en 1790 au service de la maison de Brandenbourg, négocia la paix de Bâle, remplaça par intérim le comte Haugwitz comme ministre des affaires étrangères, déposa ce pesant portefeuille quelques mois avant la bataille d’Iéna, le reprit pour peu de temps dans les derniers jours de 1806, reparut sur la scène en 1810 comme chancelier d’état et pendant les douze dernières années de sa Vie ne cessa plus de jouer en Prusse le premier rôle. Le prince de Hardenberg n’a jamais songé à mettre le public dans le secret de son histoire intime ; il estimait, nous dit-il, « qu’il ne convient pas de mener le lecteur à la garde-robe. » Jamais non plus il n’a pensé à raconter aux curieux tous les incidens de sa

  1. Denkwürdigkeiten des Staatskanzlers Fürsten van Hardenberg, herausgegeben von Leopold Ranke ; Leipzig, Duncker et Humblot, 1877, 4 vol. in-8o.