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presque toujours, et plusieurs jours à l’avance, le passage d’une bourrasque un peu forte dans le nord-ouest de l’Atlantique, ou l’arrivée de vents pluvieux. On peut donc ainsi être mis sur ses gardes, sauf à demander à d’autres signes l’indication soit de la marche que suivra la tempête, soit de la région de l’Europe sur laquelle s’étendront les pluies. » On voit que la petite aiguille qui tremble et s’agite dans sa boîte nous dénonce ce qui se passe dans les hautes régions de l’atmosphère, à de très grandes distances; mais elle n’a pas seule le privilège de cette sensibilité. Le papier ioduré, qui se colore sous l’action de l’ozone atmosphérique, fournit également des pronostics qui ne sont pas à dédaigner. Il semble en effet résulter des observations simultanées faites dans les écoles normales primaires de France que les papiers ozonoscopiques annoncent l’approche d’une tourmente presque aussi sûrement que le baromètre : ils se colorent plus ou moins fortement toutes les fois que le centre d’un mouvement tournant passe dans le nord du lieu d’observation, et restent à peu près inaltérés quand le centre passe dans le sud.

On sait que l’ozone n’est autre chose que de l’oxygène à un état particulier où l’activité chimique de cet agent se trouve en quelque sorte surexcitée. Il semble que ce soient avant tout les effluves électriques qui modifient ainsi les propriétés chimiques de l’oxygène et le transforment en ozone; ce qui est certain, c’est que la présence d’une forte proportion d’ozone dans l’air stimule les fonctions vitales. Mais l’ozone est très inégalement réparti entre la ville et la campagne. Sur les bords de la mer, les papiers iodurés se colorent rapidement; ils sont moins fortement attaqués dans l’intérieur des terres. Dans les bois ou en rase campagne, l’odorat suffit parfois à discerner la présence de l’ozone; au centre des villes au contraire, on a souvent peine à en découvrir des traces à l’aide des réactifs les plus sensibles[1]. Le Bulletin de statistique municipale, qui est publié régulièrement chaque mois par les ordres du préfet de la Seine, renferme, avec beaucoup d’autres renseignemens précieux, les résultats des observations ozonoscopiques faites à Paris, dans une vingtaine de stations que M. Belgrand a instituées dès 1865 sur l’initiative de M. le docteur Bérigny. Dix années de ces observations ont été résumées par M. Marié-Davy dans un diagramme où les quantités d’ozone constatées sont figurées par des espaces noirs. Un simple coup d’œil jeté sur ces tracés permet de se rendre compte des différences énormes qui existent dans la richesse en ozone de l’air des divers quartiers

  1. A Montsouris, les observations ozonoscopiques, fondées sur l’emploi du papier ioduré de Schœnbein, sont maintenant complétées par le dosage direct de l’ozone au moyen de l’arsénite de potasse. On y emploie deux barboteurs activés par une trompe qui débite 240 litres d’air par heure. Le dosage direct permet de corriger les indications des papier iodurés.