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en même temps que ses vertus, ses noms, prénoms et qualités. Certes nos bons chanoines ne pouvaient moins faire pour l’homme généreux auquel ils doivent d’être si bien logés !

Après sa cathédrale, à défaut d’autres édifices précieux pour l’art ou par les souvenirs, Pampelune a le Vinculo. L’institution date déjà de 1527. En ce temps-là, des famines terribles désolaient périodiquement la Péninsule. La municipalité de Pampelune imagina de consacrer 10,000 livres navarraises à l’achat de grains qu’elle céderait ensuite au public, si le blé venait à manquer ; plus tard, elle voulut aussi fabriquer et vendre le pain : même elle obtint par privilège royal que nul boulanger ne pourrait exercer sa profession dans la ville. En 1836, la vente du pain fut permise à tous, mais le Vinculo subsista et servit à régulariser la hausse et la baisse des prix. Depuis lors il a pu, avec ses bénéfices, faire construire sur la promenade de Valence un magnifique établissement ; le pain y est fabriqué à la mécanique, et tous les perfectionnemens de la science moderne s’y trouvent appliqués. Les familles qui veulent s’intéresser au Vinculo fournissent un certain nombre d’hectolitres de blé ; en retour, et moyennant une redevance annuelle, elles reçoivent le pain dont elles ont besoin pour leur consommation. Ce pain revient à peu près au même prix que partout, mais il est bien mieux fait et de meilleur goût.

La sollicitude municipale ne s’arrête pas là : les denrées de toute nature destinées à l’alimentation publique sont exactement surveillées ; dans le marché, qui appartient à la maison de ville, règnent un ordre et une propreté admirables. Le contrapeso surtout mérite l’attention : tout acheteur a le droit de faire contrôler par les balances publiques le poids de ce qu’il vient d’acheter. En outre, le municipe tient à son compte au marché un lieu de vente pour les objets de nécessité première, qu’il taxe au tarif le plus équitable. Qu’importe alors que les marchands, de concert ou séparément, élèvent à l’excès le prix des marchandises ? Le public ira se fournir aux boutiques municipales.

Au double titre de place forte et de capitale, Pampelune devait exciter la convoitise des carlistes, mais ils n’étaient pas en force de ce côté : l’artillerie leur manquait pour faire un siège en règle ; ils se contentèrent de la bloquer. Parce que la ville a tenu tête aux armes du prétendant, il ne faudrait pas croire pourtant que toute la population y soit libérale ; là, comme partout en Navarre, les carlistes font la majorité. Comme je m’étonnais un jour devant un des députés de la province que les dames et les jeunes filles, à l’encontre de ce que j’avais cru voir ailleurs, fissent si bon accueil aux officiers de l’armée : « Bon, bon, n’allons pas si