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soude à la Saône à Verdun, le Doubs, la Seille, etc. C’est en tout 673 kilomètres de voies navigables. Sur la rive droite, la Saône reçoit à Saint-Jean-de-Losne le canal de Bourgogne, à Châlon le canal du Centre ; mais le premier de ces canaux se rattache plutôt à la navigation de la Seine, l’autre à la navigation de la Loire.

Par l’étendue de son bassin, par la fertilité des campagnes qu’elle arrose, la longueur de son cours, qui est de 366 kilomètres, et l’abondance de ses eaux, par la faiblesse et la régularité de sa pente et les nombreux affluens qu’elle reçoit, la Saône serait l’une de nos plus utiles artères de navigation intérieure, si l’on avait su en tirer parti, et si l’art était venu y seconder plus heureusement la nature. Entre Saint-Jean-de-Losne et Lyon, la Saône transporte moyennement un peu moins de 400,000 tonnes de marchandises par an. Le mouvement était autrefois beaucoup plus considérable, mais la concurrence du chemin de fer de Paris à Lyon et surtout le mauvais état du Rhône ont détourné les longs transports et amoindri le tonnage de moitié. Plus d’un se rappelle le temps où la Saône tenait le premier rang parmi les voies navigables de la France. Parcourue en tout sens, couverte de trains de bois, sillonnée par de rapides bateaux à vapeur, qui avaient remplacé les coches d’eau que connurent si longtemps nos pères, elle était la grande artère naturelle par laquelle le nord et le midi communiquaient, échangeaient leurs produits. Elle alimentait une nombreuse population de mariniers et enrichissait les entrepreneurs de transport.

La batellerie de la Saône et du Rhône a été un moment la plus considérable, la plus puissante qui ait jamais exploité nos voies fluviales. Il y a vingt-cinq ans, 80 bateaux à vapeur transportaient encore quantité de marchandises et de voyageurs de Marseille à Lyon, de Lyon à Châlon. Il en reste à peine une dizaine, composant un matériel mal entretenu qui se détériore chaque jour, et que le trafic laissé par la compagnie du chemin de fer de Paris-Lyon-Méditerranée ne suffit pas même à occuper. Aussi les doléances de notre marine fluviale sont-elles incessantes, et son syndicat s’adresse-t-il à chaque occasion aux ministres compétens, qui lui répondent par de bonnes paroles, mais ne font peut-être pas tout ce qu’il faudrait[1]. L’antique prospérité de la Saône et du Rhône, que les populations riveraines ont tant de motifs de regretter et que tous les intéressés rappellent toujours avec tant de raison, renaîtra quand on le voudra avec l’amélioration de la rivière et du fleuve. M. Krantz n’évalue la dépense des travaux à

  1. Voyez entre autres la lettre adressée à M. le ministre des travaux publics par le syndicat de la marine, à la date du mois de janvier 1875.