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grand nombre d’historiens de l’église, c’est aussi par une tendance de plus en plus marquée à faire revivre la monarchie pontificale dans sa hiérarchie, c’est par une indulgence excessive pour les cruautés antichrétiennes du passé. Ils glorifient l’inquisition, sans soupçonner qu’absoudre les inquisiteurs c’est absoudre les terroristes; quelques-uns même s’emportent jusqu’à réhabiliter la Saint-Barthélemy et la révocation de l’édit de Nantes. Qu’en est-il résulté? Comme leurs aïeux du XVIe siècle qui couraient aux armes quand les édits de tolérance étaient déchirés, les écrivains protestans ont répondu par de nouvelles déclarations de guerre : par les Leçons de la Saint-Barthélémy, par la Saint-Barthélémy devant l’histoire, par les Martyrs poitevins, par la Persécution de l’église de Rouen au XVIIIe siècle; les gloires les plus pures de l’église gallicane elles-mêmes ont été mises en accusation, et pour montrer que le catholicisme a pour base immuable le compelle intrare, M. Douen a publié un livre sur l’intolérance de Fénelon, d’après des documens inédits. Si l’on en juge par le programme récemment adopté dans la faculté libre d’Angers, on peut craindre que le nouvel enseignement ne rende la polémique plus ardente encore. Ce programme porte en effet sur les troubles civils et religieux du XVIe siècle, et, bien que nous soyons les premiers à reconnaître qu’il faut laisser à la science une entière liberté, nous croyons qu’il eût été prudent de choisir un autre sujet. Quelque modération que les professeurs apportent dans leurs cours, il semble impossible, par le caractère même de leur enseignement, qu’ils concluent en faveur de la liberté de conscience, et nous savons par de récens exemples quels orages soulèvent les atteintes plus ou moins directes portées à ce dogme des sociétés modernes.

La biographie, qui résume par la vie des hommes les grands et les petits côtés de l’histoire n’est pas restée en arrière; elle a produit plus de deux cents publications par année, et dans le nombre il en est, comme le Duquesne de M. Jal, le Duguesclin de M. Luce, le Gabriel Rouquette, l’évêque réformateur, de M. Pignot, qui sont de véritables histoires générales sur un sujet et un temps donnés. Toutes n’ont point cette importance, mais presque toutes offrent un certain attrait de curiosité. On suit avec plaisir M. le docteur Chéreau sur le Parnasse médical français, et l’on s’étonne de trouver tant de fils d’Esculape mêlés aux favoris des muses. Les noms les plus illustres se rencontrent avec les noms les plus obscurs, mais les plus humbles destinées elles-mêmes ont leur grandeur, et c’est une bonne pensée d’ouvrir dans notre Panthéon une galerie aux hommes qui n’ont eu d’autre ambition que celle d’être utiles. Les morts de la guerre ne sont pas oubliés non plus, et nous voudrions pour ceux-là que chaque ville, chaque canton, consacrât leur mémoire par un