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contre les insultes des croiseurs ennemis, — à la mer et au mouillage, se tenir en communication avec les sémaphores, prêts à se porter rapidement et suivant les indications de ceux-ci sur les points menacés, — tel est le rôle des croiseurs rapides.

La défense mobile sur mer, considérée dans son rôle purement défensif, n’a pas et ne peut pas avoir une action aussi étendue que la défense mobile sur terre. Celle-ci, quoi qu’il arrive, reste toujours libre de ses mouvemens, libre de son action. Il n’en est pas de même de la défense mobile sur mer, dont l’action, dans le cas de la défensive, se resserre et devient presque locale. De là l’obligation de la répartir par groupes stationnant sur les points dont l’importance réclame sa présence et son concours, comme les arsenaux maritimes, les ports de commerce, les embouchures des fleuves.

On se représente les croiseurs rapides comme servant à relier entre eux ces divers groupes, anneaux de la défense mobile, pour en former une chaîne continue. Parmi ces anneaux, les uns sont fixes et rivés sur le lieu qu’ils occupent, les autres peuvent se mouvoir et se déplacer. Ainsi d’un côté les chaloupes canonnières et batteries flottantes, de l’autre les gardes-côtes cuirassés et navires-torpilles. À ces derniers, gardes-côtes cuirassés et navires-torpilles, aussi bien qu’aux croiseurs, il faut préparer des abris temporaires. Il faut en préparer aux navires désemparés dans le combat. N’oublions pas qu’après la Hogue Tourville aurait pu sauver ses vaisseaux, s’il avait trouvé à sa portée un abri, un port qui pût les recueillir. Ces abris temporaires, ces ports de refuge, c’est particulièrement la côte de la Manche qui les réclame. La côte anglaise vis-à-vis est riche en ports de refuge, aussi bien que la côte allemande sur la Baltique. Le port de refuge, abri fortifié des navires de commerce et de cabotage aussi bien que des navires de guerre, fait partie du système défensif du littoral.

Les arsenaux maritimes seraient, en cas de guerre, l’objectif principal de l’attaque; aussi doivent-ils occuper le premier rang dans les préoccupations de la défense. Après les arsenaux viennent, dans leur ordre d’importance, les embouchures des fleuves, les grands ports de commerce : ainsi le Havre et Marseille, tous deux également exposés aux coups de l’ennemi, tous deux également importans. Conçoit-on en effet l’ennemi pénétrant de vive force au cœur de ces grandes cités, et y prenant pied pour s’en faire une place d’armes et une base d’opérations? Tel sera cependant, tel devra être aujourd’hui un des objectifs de la guerre des côtes. Ce qu’il fait prévoir et prévenir, ce n’est pas tant le débarquement qu’un de ces coups de force soudains qui viendrait déconcerter les préparatifs incomplets d’une défense attardée. Le débarquement est devenu